Covid-19 : les gènes de Néandertal favorisent les formes graves de la maladie

homo sapiens neandertal.
Crédits : Courtesey E. Daynes

Porté par 50 % de la population en Asie du Sud et 16 % en Europe, un segment de chromosome légué par notre cousin disparu Néandertal multiplie par trois les risques de développer une forme sévère de détresse respiratoire, révèle une étude.

On est tous un peu néandertaliens

Pendant longtemps, nous pensions que les humains modernes avaient commencé à se disperser hors d’Afrique il y a environ 60 000 ans. Au cours de ces dernières années cependant, de nouvelles découvertes ont suggéré que nos ancêtres ont parcouru de vastes distances en Eurasie il y a entre 70 000 et 120 000 ans. Ceci dit, sur leur chemin, ils sont alors tombés sur Néandertal, présent dans la région depuis au moins 200 000 ans. Une cohabitation s’est ensuite installée, et nous savons aujourd’hui qu’il y a eu des rapports sexuels entre les deux espèces. En témoigne cette « petite part de Néandertal » en nous.

Des études génétiques ont en effet suggéré que, de nos jours, environ 1,5 % de l’ADN des personnes d’ascendance européenne et environ 1,7% de l’ADN des personnes d’ascendance asiatique ont été légués par Néandertal. Plus récemment, des signatures néandertaliennes à hauteur de 0,3% ont également été isolées chez les personnes d’ascendance africaine.

De nos jours, les gènes de nos anciens cousins influencent toujours la condition humaine. « Nous avons découvert des associations entre l’ADN de Néandertal et un large éventail de traits, y compris les maladies immunologiques, dermatologiques, neurologiques, psychiatriques et reproductives« , expliquait notamment le généticien évolutionniste John Capra dans Science, en 2016. Et ce n’est pas tout.

Néandertal impliqué dans les formes graves de la Covid

Une part de notre héritage génétique provenant de Néandertal pourrait également expliquer certaines formes graves de la Covid-19. C’est du moins la conclusion publiée ce mercredi dans la revue Nature par Svante Pääbo, de l’Institut Max-Planck d’anthropologie évolutionniste (Allemagne) et Hugo Zeberg, de l’Institut Karolinska (Suède).

Il existe plusieurs facteurs capables d’influencer la susceptibilité d’une personne à développer une forme sévère de la maladie comme son âge et l’existence d’autres conditions médicales. Toutefois, la génétique joue également un rôle. Au cours des derniers mois, des recherches de la Covid-19 Host Genetics Initiative ont notamment suggéré que les variantes génétiques dans une région du chromosome 3 exposent également leurs porteurs à des formes sévères de la maladie.

Ce que nous révèle aujourd’hui cette nouvelle étude, c’est que ces variantes génétiques sont quasiment identiques à celles développées par un Néandertalien de 50 000 ans découvert en Croatie. Une recherche plus approfondie a finalement conclu que les Néandertaliens apparentés à celui retrouvé en Croatie avaient légué cette région d’ADN à nos propres ancêtres il y a environ 60 000 ans, lorsque les deux groupes se sont rencontrés.

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Néandertal serait impliqué dans les formes graves de la Covid. Crédits : Ao, le dernier Néandertal

Un risque trois fois plus élevé

D’après les chercheurs, les porteurs de ce fragment chromosomique légué par nos anciens cousins présenteraient aujourd’hui un risque multiplié par trois de développer une forme grave de détresse respiratoire induite par le SARS-CoV-2. Ce variant est présent dans 50 % de la population d’Asie du Sud et chez 16 % des Européens, mais est quasiment absent en Afrique.

Notez que bien qu’il semble que les personnes qui ont hérité de ce fragment d’ADN présentent un risque plus élevé d’infection grave à la Covid-19, nous ne savons en revanche pas encore pourquoi. « Cela doit maintenant être étudié le plus rapidement possible« , conclut Svante Pääbo.