Covid-19 : les populations de poissons pourront-elles rebondir ?

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La pandémie de Covid-19 empêche actuellement des milliers de bateaux de partir en mer, créant une fenêtre d’opportunité pour les populations de poissons.

En Europe, les mesures déployées visant à ralentir la propagation du Covid-19, comme la fermeture des restaurants ou les contraintes de voyage imposées aux équipages, ont amené la plupart des flottes à rester à quai. Même chose partout ailleurs dans le monde, ou presque. De récentes données et observations satellitaires, par exemple, ont indiqué que les activités de pêcherie sont en baisse de 80% en Chine et en Afrique de l’Ouest.

Un ralentissement mondial de l’industrie de la pêche commerciale est une mauvaise nouvelle pour quiconque gagne sa vie en mer. Mais pour les poissons, la situation est un peu différente. Tout dépend du point de vue sur lequel on se positionne.

De nos jours, au niveau mondial, environ 80 % des stocks de poissons commerciaux sont en effet soit surexploités soit pleinement exploités, estime Greenpeace. La surpêche a notamment touché les populations de grands prédateurs, tels que le thon rouge du Pacifique et l’espadon en Méditerranée, dont les effectifs ont chuté d’environ 90% par rapport à l’époque préindustrielle. Aujourd’hui, le constat est simple : les flottes restent plus longtemps en mer et reviennent avec moins de poissons, tandis que la consommation continue d’augmenter chaque année.

Ainsi, pour la faune marine, prise à la gorge depuis des décennies, cette « pause » imprévue pourrait être une opportunité à saisir.

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L’expérience de la guerre

L’histoire nous a effectivement appris que la nature n’hésite pas à profiter de notre absence. Ce fut notamment le cas pendant la Première Guerre mondiale, mais aussi durant la Seconde. À l’époque, de nombreux bateaux de pêche européens et nord-américains avaient été en effet contraints de servir en tant que navires de ravitaillement ou de patrouille. Pour les autres, les mines et les attaques sous-marines rendaient souvent l’aventure en mer trop risquée.

« La guerre a entraîné un sursis temporaire pour la vie océanique et a permis aux stocks commerciaux de morue, d’églefin et de plie de se reconstituer après de fortes pressions de pêche pendant l’entre-deux-guerres », pouvait-on lire dans un article publié en 2012 dans Environment and Society. En Europe, les records de capture de certains poissons avaient à l’époque chuté de 60 à 80 %.

Après la guerre, cependant, tout s’est de nouveau accéléré. Les poissons étaient plus nombreux, plus gros et plus âgés, signe de populations en bonne santé, et les pêcheurs ont su en profiter. Par ailleurs, la guerre avait donné naissance à de nouvelles technologies (comme le sonar) qui ont rapidement servi le secteur de la pêche. C’est pourquoi les records de capture ont augmenté au cours des décennies suivantes.

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Le HMT Swansea Castle, un chalutier de pêche mis en service pendant la Première Guerre mondiale. Crédits : Wikipédia

Réel impact ou simple pause ?

La question est maintenant de savoir quels effets, le cas échéant, cette pandémie de Covid-19 aura sur les populations en mer. Un ralentissement de quelques mois n’aura probablement pas beaucoup d’impact à long terme. En revanche, si la récession venait à s’étendre davantage, les opérations de pêcherie pourraient prendre plus de temps à redémarrer et les poissons pourraient traverser un, voire plusieurs cycles de frai.

Certains restent néanmoins sceptiques quant au fait que cette pandémie puisse avoir un réel impact à long terme sur les populations de poissons. Du point de vue de la nature, rien ne pourra en effet être espéré tant que le principal moteur de la surpêche – l’augmentation de la consommation humaine – sera à la manoeuvre. Ainsi nous, humains, pourrions peut-être apprendre de cet épisode malheureux pour imaginer une manière plus durable de gérer les océans dans l’ère post-COVID-19.

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