Covid-19 : la peur et la panique plus dangereuses que le virus lui-même

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Crédits : jbarsky0/pixabay

Alors que l’expansion du nouveau coronavirus Covid-19 suscite beaucoup d’inquiétudes, entraînant parfois des décisions irrationnelles, un spécialiste en maladies infectieuses en appelle à la raison.

L’humanité a essuyé de nombreuses épidémies, mais celle du Covid-19 est la première à véritablement s’inscrire dans une époque marquée par l’omniprésence des réseaux sociaux et des chaînes d’info en continu. En conséquence, la propagation mondiale du coronavirus entraîne depuis quelques semaines un véritable déferlement de rumeurs et de fausses nouvelles sur Internet. De leur côté, les médias sont à l’affût du dernier cas contaminé, du dernier mort ou du dernier foyer épidémique.

S’il est bien évidemment nécessaires d’informer, ce type de nouvelle, dans l’esprit de certains, suscite beaucoup d’inquiétudes.

Un sentiment de panique généralisée semble alors s’installer depuis plusieurs semaines, en témoignent les rayons de pâtes et de riz vidés dans les supermarchés, ou les scènes surréalistes de pillages observées en Australie pour du papier toilette. En France, les pharmacies ont également été prises d’assaut, et les vols de masques dans les hôpitaux se sont multipliés.

« Je n’ai pas peur de Covid-19 »

Le fait est que, tout comme le Covid-19, la peur est très contagieuse. L’Homme est une espèce hautement sociale, pour le meilleur et pour le pire. Le problème, c’est que cette vague de panique pourrait en réalité faire davantage de dégâts que le virus lui-même.

C’est en tout cas l’avis d’Abdu Sharkawy, spécialiste des maladies infectieuses à l’Université de Toronto (Canada). Le médecin a publié son point de vue vendredi soir, avec un texte partagé déjà plus d’un million de fois. En voici les grandes lignes :

« Je suis médecin et spécialiste des maladies infectieuses. Je travaille dans ce domaine depuis plus de 20 ans et je vois quotidiennement des patients malades. J’ai travaillé dans des hôpitaux du centre-ville et dans les bidonvilles les plus pauvres d’Afrique. VIH-sida, hépatite, tuberculose, SRAS, rougeole, zona, coqueluche, diphtérie … il y a peu de choses auxquelles je n’ai pas été exposé dans ma profession. Et à l’exception notable du SRAS, très peu de choses m’ont laissé me sentir vulnérable, dépassé ou carrément effrayé.

Je n’ai pas peur de Covid-19. Je suis préoccupé par les implications d’un nouvel agent infectieux qui s’est propagé dans le monde entier et qui continue de trouver de nouveaux points d’ancrage dans différents sols. Je suis à juste titre préoccupé par le bien-être de ceux qui sont âgés, en mauvaise santé ou privés de leurs droits et qui souffrent le plus et de manière disproportionnée aux mains de ce nouveau fléau. Mais je n’ai pas peur de Covid-19.

Ce qui me fait peur, c’est la perte de raison et la vague de peur qui ont entraîné les masses de la société dans une spirale envoûtante de panique, stockant des quantités obscènes de tout ce qui pourrait remplir adéquatement un abri anti-bombes dans un monde post-apocalyptique.

J’ai peur des masques N95 qui sont volés dans les hôpitaux et les cliniques de soins d’urgence où ils sont réellement nécessaires pour les fournisseurs de soins de première ligne, et qui sont plutôt enfilés dans les aéroports, les centres commerciaux et les cafés, perpétuant encore plus la peur et les soupçons des autres.

J’ai peur que nos hôpitaux soient submergés par tous ceux qui pensent qu’ils « ne l’ont probablement pas, mais qui veulent quand même être examinés parce qu’on ne sait jamais … »; et que tout ceux souffrant d’insuffisance cardiaque, d’emphysème, de pneumonie ou d’accidents vasculaires cérébraux paient le prix de salles d’attente surchargées.

Mais surtout, j’ai peur du message que nous transmettons à nos enfants en réponse à une menace. Au lieu de raison, de rationalité, d’ouverture d’esprit et d’altruisme, nous leur apprenons à paniquer, à être craintifs, méfiants, réactionnaires et intéressés.

(…) Je vous implore tous, conclut le médecin. Tempérez la peur avec raison. (…) Nous avons l’occasion d’en apprendre beaucoup sur l’hygiène sanitaire et la limitation de la propagation d’innombrables maladies transmissibles dans notre société. Relevons ce défi ensemble dans le meilleur esprit de compassion pour les autres, de patience et, surtout, d’un effort sans faille pour rechercher la vérité, les faits et la connaissance, par opposition à la conjecture, la spéculation et la catastrophisation ».

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