Covid-19 : quand les Américains s’empoisonnent avec du vermifuge

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Crédits : erkars/Pixabay

Au cours de ces dernières semaines, de nombreux Américains ont de nouveau cherché à prévenir les infections à la Covid-19 en consommant de manière abusive de l’ivermectine, un médicament couramment utilisé chez les animaux. La Food and Drug Administration (FDA), l’organisme américain de régulation sanitaire, a dû monter au créneau.

« Vous n’êtes pas un cheval. Vous n’êtes pas une vache. Sérieusement, vous tous. Arrêtez ça« . Dans un tweet récemment publié, la FDA ne passe pas par quatre chemins. Et pour cause, au milieu de la dernière vague de Covid-19 alimentée par le variant delta, les autorités sanitaires ont souligné une augmentation dangereuse de l’utilisation abusive d’ivermectine, un médicament antiparasitaire couramment utilisé chez les animaux. Sans surprise, beaucoup ont été malades.

Qu’est-ce que l’ivermectine ?

L’ivermectine est utilisée depuis longtemps pour prévenir et traiter les infections parasitaires. Le médicament interfère avec des canaux ioniques spécifiques que l’on trouve chez les vers nématodes, entraînant une paralysie et empêchant ces derniers de se nourrir et de se reproduire. Ce médicament est utilisé chez les chiens et les chats pour prévenir la dirofilariose cardiopulmonaire ou « maladie du ver du coeur ». Il est également utilisé comme vermifuge pour les bovins, les chevaux, les porcs et les moutons.

Chez l’Homme, et notamment aux États-Unis, des comprimés d’ivermectine sont également prescrits pour traiter les affections causées par des vers intestinaux parasites. En revanche, ces médicaments intègrent des doses beaucoup plus faibles que celles utilisées pour le bétail. Et pour cause, à des concentrations plus élevées, l’ivermectine peut interférer avec des canaux critiques, entraînant des nausées, des vomissements, de la diarrhée, une hypotension, des étourdissements, des convulsions ou même la mort.

Cela étant dit, il y a quelques mois, des chercheurs ont publié des données suggérant que l’ivermectine pourrait potentiellement aider à lutter contre le Covid-19. En laboratoire et dans des boîtes de Pétri, l’ivermectine semblait en effet bloquer les protéines de transport intracellulaire critiques que le SRAS-CoV-2 utilise pour envahir les cellules humaines. Récemment, l’Institut Pasteur a également publié une étude encourageante menée sur des rongeurs, mais ces résultats n’ont encore jamais été répétés dans des essais cliniques.

À ce stade, aucune autorité sanitaire ne recommande ainsi l’utilisation de ce médicament pour lutter contre la Covid, d’autant que selon des recherches, limiter efficacement l’activité du virus à l’intérieur corps humain nécessiterait l’administration de doses jusqu’à cent fois plus élevées que celles approuvées pour une utilisation chez l’Homme.

De nombreux empoisonnements

Vous l’aurez compris : il y a donc très peu de chance que l’ivermectine soit un jour approuvée pour lutter contre la Covid. Malgré cela, les usines de désinformation opérant sur les réseaux sociaux n’ont pas hésité à vanter les promesses de cette approche dès la publication de ces premières données. En conséquence, de nombreuses personnes se ruent sur le médicament depuis plusieurs mois. Incapables d’obtenir une ordonnance, certains ont même eu recours à l’achat de médicaments pour le bétail en vente libre.

Au tout début de l’année, le taux moyen de prescriptions d’ivermectine par semaine était déjà passé de 3 600 à un pic de 39 000 prescriptions au cours de la semaine se terminant le 8 janvier. Dans le même temps, les centres antipoison à travers les États-Unis avaient reçu trois fois plus d’appels liés à l’ivermectine qu’habituellement, selon le CDC.

Dans une alerte sanitaire récente, les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) ont averti que les prescriptions d’ivermectine avaient de nouveau explosé, atteignant plus de 88 000 ordonnances au cours de la semaine se terminant le 13 août. À titre de comparaison, c’est environ 24 fois plus que d’habitude. Cette fois, les appels vers les centres antipoison ont été multipliés par cinq. Ces appels ont également été liés à une augmentation des visites aux urgences et à l’hôpital liées à l’ivermectine.