À la base, nos coudes et épaules ont évolué comme un système de freinage

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Les chimpanzés, nos plus proches parents, ont probablement développé des articulations flexibles des épaules et des coudes pour contrecarrer les effets de la gravité sur leur corps plus grand. Crédits : Jeremy DeSilva

Nos épaules rotatives et coudes extensibles, qui nous permettent aujourd’hui de faire énormément de choses, ont peut-être d’abord évolué comme un système de freinage naturel pour nos ancêtres primates qui avaient simplement besoin de descendre des arbres. C’est en cas ce que propose une étude publiée récemment.

Des articulations pour gérer la descente

Il y a plusieurs millions d’années, nos ancêtres simiens décidèrent de grimper aux arbres. Peut-être cherchaient-ils alors à se nourrir, à échapper aux prédateurs ou bien simplement à se reposer. Qu’elle qu’en soit la raison, ces anciens primates ont découvert que le simple fait de grimper n’était pas simple. Ils ont également vite compris que descendre en un seul morceau était peut-être encore plus difficile.

Pendant longtemps, les chercheurs spécialisés dans l’évolution se sont interrogés sur les moyens déployés par nos ancêtres pour grimper aux arbres. Cependant, et comme le souligne Nathaniel Dominy, biologiste évolutionniste à l’Université de Dartmouth, « personne n’a encore pris la peine d’étudier la descente« .

Dans le cadre de travaux récent, le chercheur et son équipe ont découvert que les singes et nos anciens ancêtres humains ont probablement développé des articulations flexibles au niveau des épaules et des coudes pour contrecarrer les effets de la gravité sur leurs corps plus grands. Imaginez une sorte de « frein moteur » permettant de mieux contrôler la descente. Les chercheurs postulent également que ces adaptations ont persisté lorsque les premiers humains ont peu à peu abandonné les arbres au profit des habitats ouverts, ces derniers favorisant la chasse ou encore la cueillette.

Plus d’amplitude au niveau des épaules

Mary Joy, co-auteure de l’étude, est la première à avoir songé à ce type d’adaptation. L’idée lui est venue en regardant des vidéos de chimpanzés et de singes verts mangabey (originaire d’Afrique occidentale et centrale).

En utilisant un logiciel généralement utilisé pour analyser les mouvements des athlètes humains, la chercheuse a constaté que lorsqu’ils descendaient d’un arbre, les chimpanzés fléchissaient en effet leurs épaules d’environ 14 degrés de plus et étendaient leurs coudes d’environ 34 degrés supplémentaires en comparaison des plus petits singes. Autrement dit, les chimpanzés donnaient l’impression d’effectuer une chute contrôlée tout en utilisant une amplitude de mouvement complète pour aller le plus vite possible.

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Trois singes verts mangabey. Crédits : Luc Fannin

Cette amplitude de mouvement plus libre correspond à ce que nous savons déjà sur les variations anatomiques entre les chimpanzés et les singes verts. Les premiers ont des articulations d’épaule dont la forme rappelle à peu près celle d’une rotule par rapport aux articulations plus en forme de poire chez les plus petits singes. De plus, les articulations du coude chez les chimpanzés s’ouvrent plus largement. Ensemble, ces éléments permettent une plus grande amplitude de mouvement.

Or, les humains ont une anatomie des épaules et des coudes similaire à celle des chimpanzés, tout comme les anciens hominidés comme Ardipithecus et Australopithecus. Les chercheurs pensent que cette adaptation a probablement émergé il y a quinze à vingt millions d’années. Ils aimeraient désormais corroborer leurs découvertes, publiée dans la revue Royal Society Open Science, en examinant la manière dont d’autres gros singes qui grimpent aux arbres de temps en temps, comme les mandrills et les babouins, gèrent aussi la descente.