Coronavirus : mais à quoi joue le Royaume-Uni ?

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Il y a quelque jours le gouvernement britannique a décidé de s’appuyer sur « l’immunité collective » pour contrôler la pandémie de coronavirus. Une stratégie risquée et contraire à l’éthique, qui oblige les Anglais à faire machine arrière.

Emmanuel Macron a annoncé, lundi 16 mars, des mesures drastiques pour ralentir l’épidémie de coronavirus. Après la fermeture des établissements scolaires et de tous les commerces « non essentiels », les sorties sont désormais limitées et doivent être justifiées, sous peine d’amende. Une stratégie sensiblement calquée sur celle de l’Espagne et de l’Italie, deux nations durement touchées par le virus.

Mais nous ne sommes pas seuls. De manière générale, la grande majorité des pays concernés ont adopté cette manoeuvre qui, comme nous pouvons dorénavant le constater en Chine, est capable de porter ses fruits.

Néanmoins certains, comme le Royaume-Uni, ont décidé d’adopter une approche différente : celle de l’immunité collective.

De quoi s’agit-il ?

De manière très grossière, notre corps, en réponse à une infection, s’appuie sur son système immunitaire pour produire des anticorps dans le but de combattre l’ennemi. Une fois la maladie essuyée, notre organisme conserve une « mémoire » de cette attaque. Il peut ainsi, en cas de nouvelle intrusion, le combattre mieux et plus rapidement.

Le principe d’immunité collective, toujours de manière grossière, suggère que si suffisamment de personnes développent une immunité contre un virus, il cessera de se propager aux personnes qui ne l’ont pas encore attrapé.

Pour prendre l’exemple du nouveau coronavirus, nous savons que ce dernier à un taux de reproduction compris entre 2 et 3. Autrement dit, une personne infectée peut en infecter deux ou trois dans son entourage, en moyenne. Pour briser la chaîne de transmission – autrement dit pour que l’ensemble de la population soit protégée d’une épidémie – le but est donc de faire en sorte que le taux de reproduction du virus descende en dessous de 1. Et pour ce faire, il a été suggéré qu’il faudrait qu’environ 60% des Britanniques contractent le virus.

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Des représentants du COVID-19 vus au microscope. Crédits : NIAID-RML

Oui mais…

Sur le papier, les mathématiques fonctionnent. Patrick Vallance, le conseiller scientifique en chef du gouvernement britannique Boris Johnson, n’a d’ailleurs cessé de le marteler dans les médias pendant plusieurs jours.

Mais la stratégie est risquée. D’une part, parce que nous n’avons pas assez de recul sur cette épidémie pour évaluer précisément quelle pourrait être son issue. Et d’autre part, bien que certaines personnes puissent effectivement ne pas être gravement touchées par la maladie, dans le cadre d’une stratégie d’immunité collective, celles-ci pourraient toujours transmettre le virus à des personnes plus fragiles qui, elles, courent un risque plus élevé de mourir.

À titre d’exemple, une analyse d’experts a récemment estimé que la mise en place d’une immunité collective au Royaume-Uni nécessiterait l’infection de plus de 47 millions de personnes. Avec un taux de mortalité de 2,3%, cela pourrait entraîner la décès de plus d’un million de personnes. Il a par ailleurs été calculé que huit autres millions de personnes devraient intégrer les services de soins intensifs.

Ces chiffres, sur le plan éthique, sont bien évidemment abominables. Et de toute façon, même avec tous les efforts du monde, le système de santé britannique serait bien incapable d’absorber autant de patients.

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Une prise de conscience ? Pas vraiment

Certains britanniques ont néanmoins commencé à prendre la mesure de la situation. Depuis quelques jours les rues ont en effet commencé à se vider, peu à peu. Le gouvernement a également réévalué sa stratégie en réponse à ces nouvelles données suggérant que des centaines de milliers de vies pourraient être en danger.

De nouvelles mesures ont donc été prises. Les écoles seront fermées à partir de vendredi. À Londres, une quarantaine de stations de métro ont été fermées. Il est également désormais fortement conseillé aux gens d’éviter les contacts « non essentiel », d’aller dans les restaurants, pubs, théâtres et, si possible, sur leur lieu de travail, même si d’un point de vu légal ces mesures de confinement ne sont toujours pas obligatoires.

Reste à savoir si ces efforts pourront être payants. Beaucoup en doutent, à l’instar d’Emeline, une jeune française expatriée à Londres depuis quatre ans. « Les anglais n’écoutent pas vraiment les mesures prises et continuent de faire leur vie, nous a-t-elle confié, ajoutant qu’elle venait d’être conviée à un mariage à l’Est de la ville, au cours duquel au moins 500 personnes devraient être présentes la semaine prochaine. Bien évidemment, elle a décliné l’invitation.

Pour rappel, le nombre de décès causés par le coronavirus a progressé de 30 % en une journée ce mercredi au Royaume-Uni (104 morts à ce jour).

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