Cordes cosmiques : des traces possibles du Big Bang enfin détectées ?

cordes cosmiques
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Depuis des décennies, les astrophysiciens scrutent l’Univers pour trouver des indices sur ses origines et sa structure profonde. Parmi les hypothèses les plus fascinantes, celle des cordes cosmiques, des fissures supposées dans le cosmos formées juste après le Big Bang, suscite un intérêt grandissant. Aujourd’hui, une équipe d’astrophysiciens affirme avoir peut-être détecté des preuves de leur existence, ce qui ouvre la voie à une meilleure compréhension de notre cosmos.

Qu’est-ce qu’une corde cosmique ?

Les cordes cosmiques sont des structures hypothétiques fascinantes imaginées pour la première fois dans les années 1970 par le physicien théoricien Tom W.B. Kibble. Ces entités théoriques nées des prémices de l’Univers pourraient nous révéler des secrets profonds sur son évolution et les lois qui le gouvernent.

Selon les théories, les cordes cosmiques auraient vu le jour une fraction de seconde après le Big Bang, lors d’une phase cruciale connue sous le nom de transition de phase cosmique. Pendant cette transition, l’Univers, en expansion rapide, serait passé d’un état énergétique extrêmement dense et chaotique à un état plus stable. Ce processus, comparable à l’apparition de fissures dans une glace qui gèle soudainement, aurait laissé derrière lui des imperfections ou des cicatrices structurelles dans l’espace-temps : les cordes cosmiques. Ces objets seraient donc des témoins directs des premiers instants du cosmos.

Des structures infiniment fines, mais incroyablement denses

Les cordes cosmiques défient notre intuition. Elles sont décrites comme étant unidimensionnelles, c’est-à-dire qu’elles possèdent une longueur immense, mais une épaisseur incroyablement réduite, bien inférieure à celle d’un proton, la particule subatomique qui compose les noyaux atomiques.

Malgré cette finesse inimaginable, leur densité est telle qu’un centimètre de corde cosmique contiendrait autant de masse qu’une montagne entière. Ce contraste extrême entre leur taille et leur densité leur conférerait des propriétés gravitationnelles phénoménales capables de déformer l’espace-temps autour d’elles.

Si elles existent, les cordes cosmiques pourraient également s’étendre sur des distances incroyables, potentiellement sur toute la largeur de l’Univers observable, soit environ 93 milliards d’années-lumière. Cette immensité ferait d’elles des structures uniques dans le cosmos, des lignes directrices étirées dans l’espace, témoins de son histoire et de son expansion.

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Comment détecter ces « fissures » ?

Bien que théoriques et incroyablement fines, les cordes cosmiques pourraient laisser des traces visibles dans l’Univers grâce à leurs effets gravitationnels. Les astrophysiciens explorent trois principales méthodes pour tenter de les détecter.

Tout d’abord, les ondes gravitationnelles offrent une piste prometteuse. Lorsque des cordes cosmiques se croisent ou forment des boucles, elles peuvent produire de puissantes vibrations dans l’espace-temps lui-même. Ces ondes gravitationnelles, similaires à celles déjà captées par des instruments comme LIGO ou VIRGO, pourraient être des indices directs de l’existence de ces mystérieuses structures.

Ensuite, les cordes cosmiques pourraient provoquer un phénomène appelé lentille gravitationnelle. En raison de leur densité extrême, elles seraient capables de déformer la lumière provenant d’objets très éloignés, comme des galaxies. Ce phénomène pourrait donner l’illusion que l’image d’une galaxie unique apparaît en double, comme si elle avait été grossie ou pliée par la corde cosmique.

Enfin, le rayonnement cosmique de fond (CMB), vestige lumineux du Big Bang, constitue une autre voie d’exploration. Ce rayonnement fossile imprègne tout l’Univers et pourrait porter des signatures subtiles de l’existence des cordes cosmiques. Grâce à des télescopes ultra-sensibles, les chercheurs espèrent détecter ces indices cachés dans le CMB et ainsi confirmer l’existence de ces mystérieuses fissures.

Ces trois approches combinées forment une stratégie ambitieuse pour percer l’un des mystères les plus fascinants de l’astrophysique moderne.

Une découverte prometteuse ?

Récemment, une équipe d’astrophysiciens a identifié une région de l’espace appelée CSc-1 comme un candidat potentiel pour la détection de cordes cosmiques. En observant cette zone, ils ont repéré deux galaxies proches, capturées par le télescope Chandra de l’Himalaya. À première vue, ces galaxies semblent distinctes. Toutefois, en analysant leur lumière, les chercheurs ont constaté des similitudes spectrales frappantes, ce qui suggère qu’il pourrait en réalité s’agir d’une seule et même galaxie, dont l’image aurait été déformée par une corde cosmique agissant comme une lentille gravitationnelle.

Selon les chercheurs, le modèle de lentille créé par une corde cosmique pourrait expliquer la disposition des galaxies dans cette région et les effets observés. Bien que cette hypothèse ne soit pas encore confirmée, elle constitue une avancée significative dans la quête des cordes cosmiques.

Des implications majeures pour la cosmologie

Si ces cordes cosmiques sont confirmées, leurs implications pourraient être révolutionnaires. Elles pourraient servir de laboratoire naturel pour tester les théories fondamentales de la physique, notamment la théorie des cordes ou la gravitation quantique. Leur étude pourrait également nous en apprendre davantage sur les conditions extrêmes de l’Univers primordial, une époque encore largement mystérieuse.

De plus, les cordes cosmiques pourraient jouer un rôle dans la formation des structures à grande échelle du cosmos, comme les galaxies et les amas galactiques. En étudiant leurs propriétés, les astrophysiciens espèrent percer les secrets de la naissance et de l’évolution de notre cosmos.

Prudence scientifique : des questions en suspens

Malgré l’enthousiasme suscité par ces observations, les chercheurs appellent à la prudence. Les similitudes entre les galaxies observées pourraient s’expliquer par d’autres phénomènes, comme une simple proximité ou une lentille gravitationnelle causée par une masse plus classique, comme un amas de matière noire.

Bien qu’impressionnants, les instruments actuels restent limités dans leur capacité à fournir des preuves solides. Les scientifiques espèrent que les télescopes de prochaine génération, comme le télescope spatial James Webb ou d’autres encore en développement, permettront d’obtenir des observations plus précises.

Bien qu’encore en cours, cette étude marque donc une étape importante dans une quête vieille de plusieurs décennies. Alors que les astrophysiciens continuent d’affiner leurs observations, une question demeure : les cordes cosmiques sont-elles enfin sur le point de passer du domaine de la théorie à celui de la réalité ?