L’invasion de l’Ukraine par la Russie a fait ressurgir le spectre de la bombe nucléaire. Mais concrètement, à quoi ressemblerait une telle explosion sur le terrain et que se passerait-il ensuite ?
La Russie est aujourd’hui la première puissance nucléaire mondiale avec 6 600 têtes recensées, suivie des États-Unis. À eux deux, ces deux pays détiennent 90 % des armes nucléaires mondiales. On distingue deux principaux types d’armes : les armes stratégiques et les armes tactiques. Les premières sont conçues pour détruire des sites importants et géographiquement éloignés (plus de 5500 km), tandis que les secondes, moins importantes, sont conçues pour être utilisées pour des frappes plus petites, parfois sur des champs de bataille.
Depuis l’invasion de l’Ukraine par les forces russes, certains spécialistes ont spéculé sur le fait que la Russie pourrait utiliser des armes nucléaires contre tout pays de l’OTAN impliqué directement dans ce conflit contre la Russie. Selon certains experts en politique étrangère, un scénario peut-être plus probable serait un conflit nucléaire à échelle limitée impliquant uniquement des armes tactiques (30 à 40 % des arsenaux américains et russes).
Fission nucléaire
Il existe donc différents types et tailles d’armes nucléaires, mais toutes utilisent l’énergie dégagée par la fission de noyaux atomiques lourds en atomes plus légers. Ce processus libère des neutrons, qui pénètrent ensuite dans les noyaux des atomes proches. Ces derniers se divisent à leur tour et s’en suit une réaction en chaîne incontrôlable.
L’explosion de fission qui en résulte est dévastatrice. Les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki, au Japon, avaient une force comprise entre quinze et vingt kilotonnes de TNT. De nombreuses armes modernes ont cependant le potentiel de faire beaucoup plus de dégâts.
Par exemple, les bombes thermonucléaires (ou à hydrogène) utilisent la puissance de la réaction de fission initiale pour fusionner les atomes d’hydrogène à l’intérieur de l’arme. Cette réaction de fusion déclenche alors encore plus de neutrons qui créent plus de fission qui crée plus de fusion et ainsi de suite. Vous obtenez alors une boule de feu affichant des températures égales à celles enregistrées au centre du soleil. Certaines de ces bombes ont été testées, mais aucune n’a pour le moment été utilisée sur le champ de bataille.
Des effets dévastateurs
Être près du point zéro d’une telle explosion nucléaire est naturellement synonyme de mort assurée. Une arme nucléaire de dix kilotonnes équivalente à la taille des bombes d’Hiroshima et de Nagasaki tuerait par exemple environ 50 % des personnes dans un rayon de 3,2 km de détonation au sol. Ces décès seraient principalement dus au souffle, aux brûlures et à l’effet des radiations. En ville, la plupart des bâtiments dans un rayon de 0,8 km de la détonation seraient complètement détruits ou gravement endommagés.
En cas d’attaque imminente, le site Web du gouvernement américain Ready.gov conseille de se cacher dans un sous-sol ou au centre d’un grand bâtiment et d’y rester pendant au moins 24 heures. Vous ne seriez pas sorti d’affaire pour autant. Entre les routes et les voies ferrées détruites, les hôpitaux rasés, et les médecins, infirmières et premiers intervenants dans la zone de l’explosion morts ou blessés, sans oublier les incendies en cours et les niveaux très élevés de rayonnement, une aide tarderait sûrement à venir.
La radiation est la conséquence secondaire et beaucoup plus insidieuse d’une explosion nucléaire. Les armes thermonucléaires modernes feraient en effet exploser des matières radioactives dans la stratosphère, permettant des retombées mondiales. Le niveau de retombées dépendrait alors du fait que la bombe explose au-dessus du sol dans un souffle aérien (plus grave) ou au sol (effet plus limité). Le risque de retombées serait le plus important dans les 48 heures suivant l’explosion. Or, tous les survivants exposés à ces retombées présenteraient un risque élevé de cancer tout au long de leur vie.
Catastrophe environnementale
La radioactivité aurait également de graves effets sur l’environnement. Les retombées pourraient notamment être absorbées par les terres cultivées, dont les semences seraient ensuite consommées, favorisant ainsi les risques de cancer. L’iode radioactif pourrait plus particulièrement être un problème. Nous savons en effet que les vaches concentrent l’iode dans le lait et que les enfants consommant ce lait concentrent ensuite cet iode dans leur thyroïde.
Suffisamment de cendres et de suie injectées dans l’atmosphère (plusieurs bombes nécessaires) pourraient également entraîner un effet refroidissant sur le climat. À titre d’exemple, une centaine d’armes de la taille de celle larguée sur Hiroshima en 1945 abaisseraient les températures mondiales en dessous de celles du petit âge glaciaire (de 1300 à 1850). Un tel refroidissement soudain pourrait alors avoir un impact sur l’agriculture et l’approvisionnement alimentaire.