Comment les chimpanzés ont aidé à restaurer la forêt tropicale

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Crédits : Rabenspiegel / Pixabay

Il y a environ 2 500 ans, les chimpanzés ont aidé à la régénération des forêts tropicales africaines en dispersant les graines de palmiers à huile. Aujourd’hui, ces mêmes forêts sont de nouveau menacées, tous comme les chimpanzés.

Couvrant près de trois millions de km2, la forêt du bassin du Congo, en Afrique centrale, est le deuxième massif forestier tropical après la forêt amazonienne. Nous pourrions imaginer cette forêt très ancienne. En réalité, elle a été massivement fragmentée il y a entre 2500 et 3000 ans.

Il y a encore quelques années, les scientifiques pensaient que l’Homme avait été responsable de ce déclin. Cette croyance fut en grande partie motivée par la présence de restes de pollen de palmier à huile préservés dans la boue des lacs environnants. Ces arbres, plantés aujourd’hui à une échelle industrielle, ont en effet toujours été une source importante de nutrition pour les habitants de la région.

Récemment, des analyses menées dans un laboratoire pollinique à Montpellier concentré sur l’histoire forestière africaine ont suggéré une histoire différente. « Là, ma vision simplifiée du pollen de palmier à huile fossilisé suggérant la présence d’humains a été totalement renversée« , explique en effet Alex Chepstow-Lusty, aujourd’hui à l’Université de Cambridge.

Sécheresse prolongée

Ces recherches ont en effet permis de préciser les données disponibles, assurant finalement que la quasi-décimation des forêts tropicales s’était opérée y a environ 2 500 ans dans le bassin du Congo et sur une vaste étendue s’étendant du Sénégal moderne au Rwanda.

Or, les preuves archéologiques laissent à penser que la présence humaine dans ces régions était assez restreinte et éparse à cette époque. Autrement dit, les humains, qui peuvent être responsables de bien des maux sur Terre, n’avaient cette fois pas grand-chose à voir avec la destruction aussi rapide et à une si grande échelle de cette forêt.

Alors, qu’est-ce qui a causé l’effondrement de ces massifs ? Il s’avère que la réponse nous est tout aussi familière : le changement climatique.

Les travaux d’Alex Chepstow-Lusty, accompagné des chercheurs Pierre Giresse et Jean Maley, ont en effet permis de constater que l’Afrique centrale et occidentale avaient essuyé une importante saison de sécheresse prolongée il y a environ 2500 ans. Les forêts tropicales se sont alors fragmentées, laissant la place à une végétation de type « savane » composée de graminées et d’arbustes épars.

Le rôle clé des chimpanzés

Dans les siècles qui ont suivi, les forêts se sont ensuite rapidement régénérées, y compris avec des espèces comme le palmier à huile. Les grosses graines de ces arbres étant trop lourdes pour être « portées » par le vent, certains animaux les ont donc forcément disséminés par le biais de leurs excréments.

Pour les chercheurs, les chimpanzés, qui se délectent volontiers de la chair orange vif de ces gros fruits, ont probablement joué un rôle crucial dans la régénération de ces forêts tropicales africaines.

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Crédits : Suju/pixabay

De nos jours, ces mêmes forêts sont de nouveau confrontées aux risques liés au changement climatique. Néanmoins, d’autres dangers viennent s’y ajouter. En raison de la surexploitation du bois, la déforestation y est en effet importante, ce qui entraîne une diminution de la biodiversité.

Le marché de la viande de brousse contribue également à éliminer les espèces clés de ces régions, telles que les chimpanzés. Au début du 20e siècle, il y en avait encore un million dans ces forêts. Aujourd’hui, il n’en reste que moins de 300 000 à l’état sauvage.

Le problème est que sans animaux pour déplacer les graines, en particulier les plus grosses et les plus lourdes, la composition naturelle et la régénération de ces forêts sont menacées. C’est pourquoi outre les motivations éthiques, les précieux services fournis par ces animaux devraient être pris en considération pour mieux les protéger. De ce fait, nous pourrions ainsi aider à conserver les forêts elles-mêmes.