Comment le Sahara fertilise continuellement l’Amazonie

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Si le désert du Sahara et la forêt amazonienne sont séparés par plusieurs milliers de kilomètres, une équipe de chercheurs nous propose une infographie qui détaille le voyage du sable partant du continent africain pour finir sa route dans les sols du continent américain. Ce cycle naturel est un apport essentiel pour la croissance du « poumon de la Terre ».

Une nouvelle étude publiée fin février 2015 dans le journal Geophysical Research Letters nous offre la première quantification du voyage de plusieurs tonnes de phosphore contenues dans le sable saharien vers l’Amazonie après un périple de plus de 4 000 kilomètres. Pour obtenir ces chiffres, les équipes de l’Université du Maryland, en partenariat avec le Goddard Space Flight Center de la NASA, se sont basées sur des données collectées par le satellite CALIPSO entre 2007 et 2013.

En moyenne chaque année, 182 millions de tonnes de poussière quittent le plus grand désert du monde, dont 27 millions de tonnes atterrissent dans le bassin amazonien. Dans ce sable se trouve du phosphore, un nutriment important pour l’équilibre de la forêt amazonienne. En effet, le sol amazonien est pauvre, on estime que 90 % des sols de l’immense bassin – 960 millions d’hectares – en manquent, lessivés par les pluies et les eaux de ruissellement. Ces poussières s’avèrent donc être un excellent fertilisant bourré de potassium, calcium et magnésium.

La richesse de la poussière du désert du Sahara doit son origine au lac du Tchad qui, il y a 10 000 ans, couvrait plus d’un million de kilomètres carrés de superficie. La dépression de Bodélé et ses vents violents ont asséché le lac et ont permis aux micro-organismes morts chargés en phosphore de se déposer sur le sol.

Si la moyenne des quantités de poussières arrachées au sol varie selon les années, on estime que 182 millions de tonnes quittent tous les ans le Sahara. De cet immense nuage de poussière, près de 28 millions de tonnes finissent leur voyage en Amazonie, soit 29 kilos par hectare et par an. Selon les chercheurs, 22 000 tonnes de phosphore se déposent ainsi sur la forêt amazonienne, soit 23 grammes par an et par hectare.

« Nous savons que la poussière est très importante à bien des égards », déclare l’auteur principal de l’étude, Hongbin Yu, chercheur au centre de vols spatiaux Goddard de la Nasa et à l’université du Maryland. « C’est une composante essentielle du système Terre. La poussière aura une incidence sur le climat et, en même temps, le changement climatique aura une incidence sur la poussière », poursuit-il. De son côté, Karen Hudson-Edwards, co-auteure de l’étude, s’inquiète : « Pour le moment, nous ne savons pas combien de temps la dépression Bodélé va continuer à fournir du phosphore à l’Amazonie. Alors que la forêt équatoriale est déjà sous la menace des activités humaines, nous espérons conduire des recherches plus approfondies pour déterminer quand cette importante source de fertilisant s’arrêtera ».

Source : Futura-Sciences