Comment l’activité des tornades évolue-t-elle avec le réchauffement du climat ?

tornade
Photo composite montrant une tornade à différents instants de son évolution. Crédits : Wikimedia Commons.

Les tornades vont-elles devenir plus fréquentes et/ou puissantes avec le changement climatique en cours ? Voit-on déjà l’effet du réchauffement sur ces phénomènes ? De façon peut-être contre-intuitive, l’état actuel de la science ne permet pas de répondre facilement à ces questions. 

L’idée qu’une modification rapide du climat global conduise à une dérégulation drastique des phénomènes comme les tornades semble trouver un écho substantiel dans l’opinion générale. Elle a probablement été popularisée par le film Le Jour d’Après. En effet, on y voit la ville de Los Angeles se faire ravager par de gigantesques tornades suite à une altération rapide des courants océaniques.

La réalité est – heureusement – bien moins hollywoodienne. Les scientifiques étudient scrupuleusement la question. En particulier aux États-Unis, où la fameuse Tornado Alley fait office de laboratoire grandeur nature. Toutefois, il faut reconnaître que pour l’heure, la question reste ouverte. En fait, la réaction des tornades à un changement climatique est loin d’être triviale.

Que disent les observations ? 

Les séries observationnelles concernant des phénomènes localisés – à la fois dans l’espace et le temps – sont difficiles à interpréter. Aux États-Unis, on note un doublement du nombre de tornades par an entre 1950 et 2018. Néanmoins, une part importante – sinon la totalité – de cette évolution est attribuable à une meilleure détection via le déploiement des radars Doppler dans les années 1990. En particulier pour les vortex les plus faibles qui passent souvent inaperçus pour des observateurs humains.

tornades tendance
Nombre de jours par an avec au moins une tornade (noir) et avec plus de 30 tornades (gris) entre 1954 et 2013 aux États-Unis. Plus précisément, les vortex semblent se concentrer sur un plus petit nombre de jours par an. Crédits : H.E. Brooks & al. 2014.

Si l’on exclut les tourbillons les plus faibles, aucune tendance robuste ne ressort des séries. Lorsque l’on prend uniquement en compte les tornades les plus violentes – égales ou supérieures à la catégorie EF-3 – une certaine décroissance apparaît même. Toutefois, il s’agit certainement d’un biais observationnel là aussi.

Par ailleurs, certains scientifiques avancent que si le nombre de tornades reste stable, il en va différemment de la façon dont elles se manifestent. Une étude parue dans Science en 2014 concluait ainsi que « les tornades sont concentrées sur un plus petit nombre de jours au cours des années les plus récentes ». Autrement dit, la variabilité de l’activité tornadique se serait accentuée – en tout cas outre-Atlantique.

Une compréhension physique encore trop incomplète

Mises à part les ambiguïtés liées aux observations, la compréhension théorique d’un éventuel lien entre réchauffement global et tornades est jugée médiocre par la communauté scientifique.

« Les augmentations observées et attendues de certains extrêmes météorologiques – tels que les fortes précipitations et les canicules – peuvent être directement liées à un climat plus chaud », peut-on lire dans le Fourth National Climate Assessment.

« D’autres types d’extrêmes, tels que les tornades, la grêle et les orages, présentent également des évolutions pouvant être liées au changement climatique. Mais les connaissances scientifiques ne sont pas encore suffisamment détaillées pour anticiper avec certitude la direction et l’ampleur des changements futurs ».

tornades orages climat
Graphique présentant le niveau de compréhension physique (axe du bas) et de capacité d’attribution (axe de gauche) d’un événement extrême donné au réchauffement global. Le fait que la pastille noire – englobant les phénomènes convectifs – se situe au plus bas sur les deux axes témoigne de la faible capacité qu’a la science à éclairer les questions posées en introduction. Crédits : Attribution of Extreme Weather Events in the Context of Climate Change, 2016.

Aux limites de la modélisation

Les modélisations numériques livrent des indices sur ce que pourrait être l’activité orageuse dans un monde plus chaud. Mais il s’agit souvent de données sur l’environnement de grande échelle – comme l’énergie de convection disponible ou le cisaillement vertical du vent. La dynamique des orages en tant que tels n’étant pas adéquatement représentée dans les simulations. Pourtant, ce sont bien les détails de l’organisation orageuse qui conditionnent ou non l’apparition d’une tornade.

« Les études de modélisation suggèrent que la fréquence et l’intensité des orages violents aux États-Unis pourraient augmenter avec les changements climatiques, en particulier dans le Midwest et le sud des Grandes Plaines au printemps. (…) mais la confiance dans ces projections est faible. [Cette faiblesse] provient en grande partie de la difficulté que représente le suivi et la modélisation des phénomènes rapides de petite échelle ».

En conclusion, en l’état actuel, la science peine à éclairer les questions relatives à cette thématique. Alors que la fréquence des tornades ne semble pas changer de façon importante, « personne ne sait quel effet le réchauffement climatique exerce sur leur intensité ». La variabilité et la saisonnalité de ces phénomènes pourraient être plus sensiblement affectées. Mais, là aussi, il reste un long chemin à parcourir avant d’atteindre une vue consensuelle.

Source

Articles liés :

La menace de tornades en Europe est bien réelle !

Les superbes images d’une tornade en pleine action immortalisées par un drone !

Une nouvelle théorie pour expliquer la formation des tornades !