La foudre a-t-elle permis le développement de la vie sur Terre ?

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Crédits : Unwetter-Freaks/Pixabay

Par quels moyens la vie est-elle apparue sur Terre ? Les chercheurs s’interrogent depuis des siècles. De nouvelles recherches suggèrent que les coups de foudre primordiaux ont pu jouer un rôle crucial en permettant la libération du phosphore.

Pour développer la vie, vous devez avoir les bons ingrédients. Et parmi eux figurent les phosphates. Ces ions composés de trois atomes d’oxygène et d’un atome de phosphore intègrent le squelette de l’ADN, de l’ARN et de l’ATP (la principale source d’énergie pour les cellules). De fait, ils sont essentiels à toutes les formes de vie connues. La question est : comment la Terre a-t-elle acquis ces composés essentiels ?

Des météores chargés en schreibersite

Il y a environ quatre milliards d’années, la majeure partie du phosphore naturel de la planète intégrait des roches insolubles. Impossible dans ces conditions de pouvoir les transformer en phosphates organiques.

Une théorie soutient que notre jeune planète pourrait avoir tiré ces composés de météores transportant de la schreibersite. Il s’agit d’un minéral composé en partie de phosphore, qui de plus est soluble dans l’eau. Si ces frappes venues du ciel chargées en schreibersite s’étaient écrasées sur la Terre pendant suffisamment de temps, alors du phosphore aurait pu être libéré dans une zone concentrée, offrant ainsi les conditions favorables à l’émergence de la vie.

Ceci dit, il y a environ 3,5 milliards à 4,5 milliards d’années, lorsque la vie sur Terre s’est manifestée pour la première fois, les simulations soutiennent que le taux de frappes de météores avait déjà chuté de façon exponentielle. C’est pourquoi la théorie du « phosphore interstellaire » ne convainc pas tout le monde.

Une étude publiée ce mardi dans Nature Communications propose une alternative. Ces travaux, dirigés par Benjamin Hess de l’Université de Yale, supposent que des milliards et des milliards de coups de foudre frappant la Terre primitive pourraient avoir contribué à débloquer des composés de phosphore cruciaux.

Un quintillion de coups de foudre

Nous savons que les coups de foudre peuvent chauffer la matière à près de 2 760 degrés Celsius, ce qui permet la formation de nouveaux minéraux. Dans la nouvelle étude, Hess et son équipe ont analysé une roche touchée par la foudre, appelé fulgurite, excavée dans l’Illinois (États-Unis). Les chercheurs ont alors découvert que de petites boules de schreibersite s’étaient effectivement formées dans la roche, ainsi qu’une foule d’autres minéraux vitreux.

Ensuite, les auteurs ont cherché à savoir si suffisamment de foudre aurait pu frapper la Terre primitive pour libérer une quantité significative de l’élément dans l’environnement.

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Une interprétation par un artiste de l’environnement de la Terre primitive. Crédits : Lucy Entwisle

Grâce à des modèles prenant en compte la composition atmosphérique de notre planète à cette époque, les chercheurs ont pu calculer le nombre de coups de foudre annuel de la Terre primitive. Réponse : entre un milliard et cinq milliards, contre un peu plus de 500 millions de nos jours. Sur cet échantillon, ils estiment qu’entre 100 millions et un milliard d’éclairs frappaient alors les terres émergées chaque année (le reste étant déchargé au-dessus des océans).

Enfin, sur un milliard d’années, jusqu’à un quintillion (un 1 suivi de 18 zéros) de coups de foudre pourraient avoir frappé notre jeune Terre, chacun à chaque fois un peu de phosphore. L’équipe a calculé qu’il y a entre 4,5 milliards et 3,5 milliards d’années, les coups de foudre à eux seuls auraient pu livrer de 110 à 11 000 kg de phosphore par an.

Ainsi la foudre a-t-elle frappé suffisamment de terres exposées pour favoriser l’apparition du vivant sur Terre ? C’est une question à laquelle nous n’aurons probablement jamais de réponse définitive. Toujours est-il que d’après cette étude, mathématiquement, c’est effectivement possible.