Des chercheurs chinois ont récemment percé les secrets génétiques des lucioles et offert un aperçu captivant de l’évolution de leur organe producteur de lumière.
Sous le scintillement des lucioles
La science a déjà percé les mystères des lucioles. Les chercheurs comprennent en effet l’enzyme qu’elles utilisent pour produire de la lumière, appelée luciférase, ainsi que les produits chimiques impliqués dans la réaction lumineuse. Ces connaissances ont transformé les lucioles en outils précieux pour étudier divers aspects de la biologie en laboratoire.
Cependant, de nombreuses interrogations persistent. Les lucioles exercent en effet manifestement un certain contrôle sur le moment où elles émettent leur lueur. En outre, elles le font uniquement à partir d’un organe spécialisé qu’aucune autre espèce ne présente, même les plus apparentées, créant ainsi une énigme scientifique fascinante.
De récents travaux menés par deux chercheurs de Wuhan, en Chine, Xinhua Fu et Xinlei Zhu, ont permis d’offrir un nouvel éclairage sur ces créatures lumineuses. Bien que l’évolution de ces organes demeure partiellement énigmatique, les chercheurs ont fait des avancées significatives sur la compréhension des gènes responsables de cette caractéristique unique.
Les gènes homéobox, architectes de la lumière
La production de lumière chez les lucioles ne se limite pas aux adultes, mais concerne également les stades larvaires, ce qui suggère une utilité évolutive liée à la signalisation de leur toxicité aux prédateurs potentiels. L’organe producteur de lumière se forme dans des segments spécifiques de l’abdomen du coléoptère, avec une cuticule transparente à l’extérieur et des cellules électroluminescentes spécialisées en dessous.
Pour percer davantage les secrets de ces organes, les chercheurs ont entrepris de séquencer le génome d’une espèce de luciole aquatique. Bien que la génétique de ces créatures soit complexe en raison de leur difficulté à être reproduites en laboratoire, cette approche a permis d’identifier plusieurs gènes potentiellement impliqués dans le développement de ces organes lumineux.
Les scientifiques se sont concentrés sur les gènes homéobox qui déterminent l’identité des segments corporels et jouent un rôle crucial dans le développement des différentes parties du corps chez diverses espèces. En neutralisant l’activité de certains de ces gènes, les chercheurs ont alors observé des perturbations dans la formation de l’organe producteur de lumière chez les lucioles.
D’après l’équipe, trois des gènes homéobox semblent jouer un rôle essentiel dans la coordination de la production de lumière, tandis que deux autres sont impliqués dans la formation même de l’organe.
Ce qui est intrigant, c’est que l’une de ces protéines homéobox dans leur génome a été identifiée comme étant l’enzyme luciférase elle-même. Les chercheurs ont découvert que ces protéines homéobox forment un complexe sur l’ADN à proximité du gène de la luciférase, ce qui active ainsi directement la production de lumière dans les cellules spécialisées.

Un processus progressif
Bien que cette étude n’ait pas encore exploré tous les aspects de la production de lumière des lucioles, elle offre une vision nouvelle des mécanismes génétiques régissant cette caractéristique unique. En découvrant les gènes clés impliqués dans ces processus, les chercheurs ouvrent ainsi la voie à des investigations plus approfondies sur le fonctionnement de ce système fascinant.
Dans le processus évolutif des lucioles, la création de leur organe producteur de lumière n’aurait donc pas nécessité le développement de quelque chose entièrement nouveau. Au lieu de cela, une fois que les éléments de base de cet organe ont été établis au fil de l’évolution, son développement ultérieur a été influencé par les gènes homéobox qui étaient déjà actifs. Ces derniers ont alors joué un rôle dans la détermination de l’identité des différents segments de l’abdomen des lucioles. Autrement dit, l’évolution de l’organe producteur de lumière des lucioles a suivi une continuité remarquable en utilisant des mécanismes génétiques déjà présents au lieu de développer quelque chose de totalement nouveau.
Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Nature.
