Les tardigrades sont aujourd’hui connus pour être les organismes les plus résistants sur Terre. Mais aussi solides soient-elles, ces petites créatures ne sont pas immortelles. La question est : combien de temps peuvent-elles vivre ?
Cela dépend de l’endroit où elles sont trouvés. Les tardigrades se rencontrent presque partout sur la planète, mais la plupart sont plus heureux dans les habitats humides, tels que la mousse qui orne les pierres des rivières. Quand ils ont suffisamment de nourriture et d’eau pour soutenir leurs fonctions corporelles, ils vivent le cours naturel de leur vie, qui dure rarement plus de deux ans et demi, selon l’Animal Diversity Web, une base de données américaine de l’Université du Michigan.
En revanche, les tardigrades peuvent survivre beaucoup plus longtemps lorsqu’ils entrent dans un état de cryptobiose, qui se déclenche lorsque les conditions environnementales deviennent insupportables. Leur métabolisme est alors en mode « pause », réduisant leur besoin en oxygène et débarrassant presque complètement leurs cellules d’eau. Dans cet état, les tardigrades imitent si bien la mort qu’ils sont capables de survivre dépourvus d’eau à des températures extrêmes (-272.9°C ou +150°C). Quand ils sont à nouveau exposés à l’eau, ils se réaniment simplement et retournent à la vie normale en quelques heures.
Sandra McInnes, chercheuse à la British Antarctic Survey qui étudie les espèces présentes dans les paysages gelés de l’Antarctique depuis 1980, a récemment décongelé un échantillon de mousse provenant d’une expérience précédente, et découvert qu’il contenait des tardigrades vivants. Elle en a déduit que les organismes avaient survécu – congelés – pendant au moins huit ans ! En 2016, un article publié dans la revue Cryobiology avait montré qu’une poignée de tardigrades, congelés dans un autre échantillon de mousse antarctique en 1983, avaient survécu dans cet état glacial pendant 30 ans jusqu’à ce qu’ils soient « relancés » en 2014. On pense que ces capacités d’auto-préservation se résument en partie à la production de protéines uniques, qui peuvent bloquer les composants cellulaires en les maintenant en position. Cela empêche les membranes, les protéines et l’ADN d’être brisés, percés et déchirés lorsque les cellules se dessèchent, selon une étude de 2017 dans la revue Molecular Cell.
Il nous reste encore beaucoup de choses à apprendre sur les tardigrades. On sait par exemple que ces petites créatures peuvent résister à des pressions allant jusqu’à 600 mégapascals – six fois ce que vous expérimenteriez au fond de la mer. Ne serait-ce que la moitié de cette pression tuerait la plupart des autres organismes sur Terre. La raison de cette résistance nous est encore inconnue. Par ailleurs, des tardigrades exposés au rayonnement solaire direct et aux rayons gamma dans l’espace ont également survécu. Ils seraient également capables de réparer leur ADN, ce qui peut expliquer pourquoi ils sont si résistants aux effets extrêmes du rayonnement.
Une autre façon d’apprécier leur résilience est de se dire qu’ils évoluaient déjà durant la période du Cambrien, il y a 541 millions d’années. Ils pourraient également nous survivre – ainsi que toutes les autres espèces sur Terre – en cas de catastrophe planétaire, selon un article publié en 2017 dans la revue Scientific Reports. En plus d’être incroyablement mignons, il semblerait donc que les tardigrades soient notre plus grand espoir de maintenir la vie sur cette planète.
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