Nous savons que Néandertal et Homo Sapiens ont coexisté en Europe, en témoigne la petite part de l’ADN de notre cousin dans notre génome. Bien qu’il soit difficile de déterminer précisément combien de temps nos deux espèces ont coexisté, des recherches suggèrent que les Néandertaliens se sont peut-être accrochés à l’Homme moderne pendant environ 2 800 ans, avant de finalement disparaître.
Il y a entre 40 000 et 50 000 ans, le paysage démographique de l’Europe se transformait, alors que les Néandertaliens étaient peu à peu remplacés par des humains anatomiquement modernes. Des preuves, isolées en Bulgarie, en République tchèque et dans le sud-est de la France, suggèrent que le premier de nos ancêtres modernes est arrivé en Europe il y a entre 45 000 et 54 000 ans. Nous savons par ailleurs que Néandertal s’est éteint il y a environ 40 000 ans. À l’échelle continentale, cela suggérerait un chevauchement possible de plus de 14 000 ans entre nos deux espèces humaines.
Malgré tout, on sait peu de choses sur la question de savoir si les deux espèces d’hominidés ont réellement occupé simultanément les mêmes régions, ni combien de temps. Le continent est grand, tandis que les populations humaines restaient relativement isolées.
Voisins durant moins de 3 000 ans
Pour tenter d’en apprendre davantage, des chercheurs ont concentré leur attention sur la France et le nord de l’Espagne, où les derniers Néandertaliens sont susceptibles d’avoir vécu. Dans ces régions, nous savons qu’une culture matérielle appelée le Protoaurignacien – qui comporte des outils largement attribués aux humains modernes – est apparue il y a environ 42 000 ans. Cette culture aurait remplacé le Châtelperronien – une autre culture plus ancienne attribuée cette fois à Néandertal.
Pour ces travaux, publiés dans Scientific Reports, les chercheurs ont daté au radiocarbone vingt-huit artefacts châtelperroniens et autant de vestiges protoaurignaciens récupérés sur dix-sept sites archéologiques. Ils ont ensuite appliqué une modélisation permettant d’estimer les dates les plus anciennes et les plus récentes durant lesquelles les humains modernes et les Néandertaliens auraient été présents à chacun de ces endroits.
Leurs analyses suggèrent que la culture protoaurignacienne (donc les humains modernes) est arrivée dans la région il y a entre 42 269 et 42 653 ans. De son côté, la culture châtelperronienne (donc Néandertal) aurait disparu il y a 39 894 à 39 798 ans.
Les chercheurs ont également daté une dizaine de fossiles de Néandertaliens au radiocarbone récupérés en France et en Belgique et ont déterminé que l’espèce s’était probablement éteinte dans la région il y a entre 40 870 et 40 457 ans. Dans l’ensemble, toutes ces données laissent entendre que nos deux espèces pourraient avoir coexisté pendant environ 1 400 à 2 800 ans en Europe occidentale.
Naturellement, ce n’est qu’une estimation basées sur les données dont nous disposons. En réalité, et les auteurs l’admettent volontiers, il est peu probable que nous puissions un jour identifier la « première » ou la « dernière » apparition d’une espèce ou tradition culturelle dans les archives archéologiques et fossiles. De fait, il sera donc impossible de dire avec certitude combien de temps précisément nos deux espèces se sont côtoyées.