Les cœurs des humains et des autres primates diffèrent génétiquement

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Crédits : aldarinho/istock

Une étude récente menée par des chercheurs du Centre Max Delbrück en Allemagne a mis en lumière des différences surprenantes entre les cœurs des humains et ceux de nos plus proches cousins, les primates non humains. Cette recherche offre de nouvelles perspectives sur l’évolution de notre cœur et pourrait ouvrir la voie à de nouvelles approches dans le traitement des maladies cardiaques.

Humains et autres primates : une similarité génomique impressionnante, mais des différences cruciales

Bien que les humains partagent environ 98 à 99 % de leur ADN avec les chimpanzés, il ne vous a pas échappé que les différences entre nos corps sont significatives. La clé de ces variations réside dans l’expression des gènes, c’est-à-dire la manière dont ces gènes sont activés ou désactivés dans nos cellules.

Imaginez notre ADN comme une bibliothèque. À l’intérieur, chaque gène est un livre contenant des instructions précises sur la fabrication de protéines qui jouent un rôle essentiel dans la structure et la fonction de chaque partie de notre corps. Cependant, tout comme une personne peut choisir quels livres lire et quand, nos cellules décident quels gènes activer ou désactiver à différents moments.

Cette régulation de l’expression des gènes est cruciale. En effet, même une petite différence dans la façon dont un gène est exprimé peut entraîner des changements physiques importants. Par exemple, chez les humains, un gène responsable de la couleur de la peau peut être très actif, produisant une certaine quantité de pigments. En revanche, chez les chimpanzés, ce même gène pourrait être moins actif et produire moins de pigment, ce qui se traduit par une couleur de peau différente.

Selon une étude, le système cardiaque est également concerné. Des recherches ont en effet déjà montré que, bien que les cœurs humains et ceux des primates non humains partagent une structure similaire, il existe des différences notables dans la taille, la forme et la fonction de ces cœurs. Nous savons aussi que les humains sont plus susceptibles de développer certaines maladies cardiaques par rapport à d’autres primates. Dans le cadre de ces nouveaux travaux, des chercheurs ont ​​mis au jour des différences dans l’expression des gènes dans le cœur des humains et des primates non humains capables d’expliquer en grande partie ces différences.

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Crédits : Ondrej Prosicky/istock

Une méthodologie innovante

Pour parvenir à ces résultats, l’équipe de recherche a utilisé des méthodes avancées en biologie moléculaire. Ils ont examiné des échantillons de tissus cardiaques provenant de différentes espèces, notamment des chimpanzés, des macaques, des humains, des rats et des souris. Grâce à des technologies de pointe, comme le séquençage de l’ARN et le Ribo-seq (qui analyse les ribosomes, les structures qui aident à fabriquer des protéines dans les cellules), les chercheurs ont pu étudier les molécules d’ARN présentes dans ces tissus cardiaques. Cela leur a permis de voir comment les gènes s’expriment différemment selon les espèces.

Les résultats de cette recherche ont révélé plus de 1 000 adaptations génétiques spécifiques à chaque espèce. Parmi elles, il y a 551 gènes et 504 microprotéines qui ne se trouvent que dans le cœur humain. Par exemple, certains de ces gènes humains montrent des signes de dérégulation dans des maladies comme la cardiomyopathie dilatée, ce qui indique qu’ils pourraient jouer un rôle important dans le développement de problèmes cardiaques.

Évolution du cœur : des réponses à des besoins uniques

Cette étude ne se contente pas de révéler des différences ; elle illustre également comment notre cœur a évolué pour répondre à nos besoins uniques. Par exemple, les humains ont généralement un rythme cardiaque plus lent que les macaques. Cette différence est liée à notre évolution et à nos besoins physiologiques. Les macaques ont en effet besoin de réagir rapidement à leur environnement, ce qui peut les amener à avoir un cœur qui bat plus vite. De notre côté, comme nous avons un mode de vie différent (nous marchons debout et nous avons des activités qui nécessitent moins de rythmes cardiaques rapides). Notre cœur a donc évolué pour fonctionner de manière plus efficace avec un rythme plus lent. Cela signifie que cet organe peut se permettre de battre moins souvent tout en fournissant l’énergie nécessaire à notre corps.

Cependant, ces adaptations peuvent également rendre notre cœur plus vulnérable à certaines maladies. Les chercheurs ont en effet découvert que certains gènes qui jouent un rôle crucial dans le fonctionnement du cœur humain peuvent être dérégulés, c’est-à-dire qu’ils ne fonctionnent pas comme prévu avec des maladies telles que la cardiomyopathie dilatée qui affecte la capacité du cœur à pomper le sang efficacement. Ainsi, bien que notre cœur ait évolué pour répondre à nos besoins spécifiques en tant qu’espèce, ces mêmes caractéristiques peuvent également rendre certaines personnes plus susceptibles de développer des problèmes cardiaques.