De nouveaux travaux précisent la façon dont les épisodes de sécheresses édaphiques durables devraient évoluer en Europe avec le changement climatique. En particulier, en cas de poursuite des émissions de carbone au rythme actuel, le Vieux Continent est promis à une multiplication assez brutale des périodes de stress hydrique prolongé.
Selon le service Copernicus Climate Change, les années 2018 et 2019 ont connu des valeurs d’humidité des sols à un niveau bas record en Europe. Ces chiffres reflètent en grande partie le déficit d’humidité observé en période estivale. Rappelons par ailleurs – et c’est lié – que les derniers étés ont connu des températures exceptionnellement élevées sur une large partie du continent. Et en cette année 2020, la situation ne semble pas réellement s’améliorer.
2018-2019 : une anomalie d’humidité des sols exceptionnelle
Or, une fraction notable des terres européennes est boisée ou utilisée à des fins agricoles. Aussi, ces conditions ont eu des impacts délétères sur la production alimentaire, la demande en eau ou bien la faune et la flore. Malheureusement, il s’agit plus là de la marque d’une tendance déjà bien ancrée que d’une anomalie passagère. Au cours des deux dernières décennies, les sécheresses ont coûté pas moins de 100 milliards d’euros à l’Europe.

Une étude parue le 6 août dernier dans Scientific Reports vient illustrer cette situation. Le travail mené s’est surtout concentré sur l’Europe centrale. La zone définie s’étendant de la France à la Pologne, en passant par la Belgique, l’Allemagne, la Suisse, l’Autriche, la Hongrie, la Slovaquie ou encore la République Tchèque.
En utilisant un ensemble de données observationnelles remontant à 1766, les chercheurs ont mis en avant le côté exceptionnel de la situation. « Les mesures suggèrent que la sécheresse européenne de 2018 à 2019 est sans précédent au cours des 250 dernières années, avec des implications substantielles à long terme pour la santé de la végétation » rapporte l’étude. De plus la persistance du phénomène sur plus d’un an explique des impacts sur les milieux naturels plus importants qu’en 2003.
Une multiplication significative des sécheresses durables
Les projections climatiques indiquent que la probabilité d’expérimenter un tel extrême sera multipliée par 7 en seconde partie de siècle. « Cette projection suggère également que les superficies cultivées touchées par la sécheresse en Europe centrale vont presque doubler » ajoute Rohini Kumar, co-auteur du papier. Plus précisément, cela représenterait 40 millions d’hectares supplémentaires. C’est-à-dire près de 60 % de toutes les terres actuellement cultivées.

Toutefois, il s’agit là d’un scénario où rien n’est fait pour limiter les rejets de gaz à effet de serre. Dans une perspective moins pessimiste où les émissions évoluent à un rythme modéré, cette augmentation serait divisée par deux. Elle reste néanmoins très signifiante. En effet, l’occurrence de sécheresse persistant sur plus d’une année affecte beaucoup plus profondément l’environnement et la vie socio-économique puisque les systèmes n’ont pas le temps de récupérer.
« Environ un cinquième de la région d’Europe centrale a enregistré une mauvaise santé de la végétation au cours des deux dernières années » ajoute Rohini Kumar. « C’est donc avec la plus grande urgence que nous devons reconnaître l’importance de ces événements persistants et développer un cadre holistique pour modéliser le risque ».