Les chevaux des Scythes nous en apprennent plus sur la domestication animale

chevaux Scythes chevaliers
Crédits : Viktor Vasnetsov/Wikimedia Commons

Une équipe internationale de chercheurs révèle certains des mystères qui demeurent sur la domestication animale par l’homme grâce à l’étude du génome des chevaux des Scythes, un peuple nomade d’Asie centrale de l’Âge de Fer.

Les Scythes étaient un peuple d’éleveurs nomades ayant vécu sur les steppes d’Asie Centrale au cours de l’Âge de Fer (du 9e au 1er siècle avant notre ère environ). L’une de leurs caractéristiques notables était leur exceptionnel art équestre et leur rapport à cet animal. Par exemple, leurs dirigeants se faisaient inhumer avec des étalons sacrifiés lors d’importantes cérémonies funéraires.

Dans cette étude menée par Ludovic Orlando, directeur de recherche du CNRS au laboratoire Anthropologie moléculaire et imagerie de synthèse, ce sont les génomes de quelques-uns de ces équidés qui ont été séquencés pour mieux comprendre cette relation si particulière développée entre le peuple scythe et ses chevaux.

Ainsi, les chercheurs ont exploité les génomes de 13 étalons vieux de 2 300 à 2 700 ans, provenant des tombes royales scythes d’Arzhan (république russe de Tuva, aux confins de la Mongolie) et de Berel » (Altaï kazakh), ainsi que celui d’une jument d’une culture antérieure trouvée à Tcheliabinsk (Russie) et âgée de 4 100 ans.

S’ils ont pu notamment déduire une riche gamme de couleurs de robe chez ces chevaux et ils ont surtout révélé un total de 121 gènes sélectionnés par les éleveurs scythes. Ceux-ci sont impliqués pour la plupart dans le développement des membres supérieurs, mais aussi dans le développement des glandes mammaires, ce qui corrobore l’utilisation du lait de jument depuis des millénaires.

« C’est aussi tout un pan de la domestication des animaux que cette étude contribue à éclairer », écrit le communiqué du CNRS. « Ainsi, les chercheurs ont déterminé les régions du génome où se sont concentrées les mutations adaptatives au cours des trois premiers millénaires de la domestication du cheval (initiée voici 5 500 ans). Ces régions portent souvent des gènes liés à une population de cellules de l’embryon appelée crête neurale, à l’origine de nombreux tissus de l’organisme ».

Cette étude apporte du poids à la « théorie de la crête neurale », laquelle explique pourquoi tous les animaux domestiques ont convergé vers des caractéristiques physiques et comportementales communes, et ce, malgré une histoire et une évolution indépendantes. « Comme la crête neurale donne naissance à de nombreux tissus, la reprogrammation de ce groupe de cellules au cours du développement peut entraîner l’apparition conjointe d’un cortège de caractères d’intérêt. La surreprésentation de gènes liés à la crête neurale parmi ceux portant des mutations adaptatives suggère l’importance de cette structure pour la domestication ».

En comparant la diversité génétique de ces chevaux anciens à celle des chevaux actuels, les auteurs ont découvert qu’un effondrement démographique a eu lieu au cours des 2 300 dernières années, entraînant une chute de la diversité génétique des chevaux. En cause : les pratiques d’élevage qui ont impliqué un nombre de plus en plus restreint d’étalons dans la reproduction. En conséquence, les chevaux domestiques actuels partagent presque tous le même chromosome Y, contrairement aux chevaux scythes.