Dans le désert, les ânes et chevaux sauvages jouent un rôle essentiel

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Crédits : HappySongtao/Pixabay

Les ânes et chevaux sauvages réintroduits dans les régions désertiques du sud-ouest de l’Amérique du Nord creusent des puits pour s’abreuver. En réalité, ils font bien plus que cela, soutenant la résilience d’un grand nombre d’espèces.

Les grands herbivores terrestres ont essuyé de vastes extinctions dès la fin du Pléistocène. Bien que le changement climatique à la fin des derniers maxima glaciaires puisse avoir joué un rôle contributif, les chercheurs s’accordent aujourd’hui sur un fait : la plupart des pertes préhistoriques sont dues à l’activité humaine.

Dans les écosystèmes tropicaux et tempérés, nous savons que ces animaux jouaient des rôles essentiels dans leur écosystème. On en sait moins, cependant, sur la façon dont la mégafaune a pu façonner les écosystèmes arides. Ces derniers représentent pourtant un tiers de la surface de la Terre.

Dans la cadre d’une étude récente, des chercheurs se sont penchés sur la principale ressource limitante et essentielle de ces zones arides : l’eau. L’équipe s’est concentrée sur deux équidés, les ânes et chevaux sauvages qui creusent régulièrement des puits pouvant s’enfoncer à deux mètres de profondeur pour obtenir de l’eau et s’abreuver. Le but était d’évaluer les effets de ces creusements de puits sur l’écosystème local.

L’étude s’est focalisée sur quatre cours d’eau alimentés par les eaux souterraines du désert de Sonora. Des données ont été recueillies toutes les deux à quatre semaines pendant trois étés.

chevaux ânes puits
Crédits : Sciencemag

Les équidés maximisent la disponibilité en eau

Ces travaux ont véritablement mis en lumière l’importance de ces puits creusés par les ânes et chevaux sauvages. Sur chaque site, les chercheurs ont en effet cartographié l’eau « d’arrière-plan » (déjà en surface) et l’eau creusée par les équidés. Sans surprise, les puits étaient particulièrement importants pour l’approvisionnement en eau au milieu de l’été. Durant cette période, les températures augmentent fortement et le niveau des nappes phréatiques diminue.

Les puits des ânes et chevaux ont également fortement réduit (jusqu’à 65%) les distances entre chaque zone aquatique, permettant ainsi aux animaux de parcourir moins de kilomètres pour s’abreuver.

Un impact sur la faune et la flore

Pour comprendre si ces puits avaient de la valeur pour d’autres espèces, les chercheurs ont déployé plusieurs pièges photographiques. Grâce à ces données, ils ont pu estimer la richesse quotidienne des espèces attirées par ces puits, mais aussi la fréquence et la durée de ces visites. Ces résultats ont ensuite été comparés aux mêmes données recueillies sur des sites proposant de l’eau de fond, mais sans puits et des sites « témoins » secs adjacents.

Dans l’ensemble, les chercheurs ont détecté 59 espèces de vertébrés dans les puits d’équidés, dont 57 ont été enregistrées en train de boire. La richesse quotidienne en espèces était respectivement plus de 50% plus élevée près des puits que près des autres sites. De même, la durée des visites était en moyenne 620% plus longue, et la fréquence des visites était plus élevée d’au moins 60%.

Le creusement de ces puits influence également la végétation. Sur une rivière pérenne endiguée du désert de Sonora, des puits d’équidés abandonnés abritent de nombreux arbres riverains (principalement Populus fremontii et Salix gooddingii).

Ici, les chercheurs ont enregistré davantage de semis que dans les zones riveraines adjacentes. Là encore, c’est une bonne nouvelle dans la mesure où la conservation de ces espèces à croissance rapide, dont la germination nécessite un substrat humide sans végétation concurrente, est considérée comme une priorité régionale.

Pour les auteurs, le constat est clair : bien que la mégafaune introduite ait été principalement étudiée comme une menace pour les objectifs de conservation, de plus en plus de preuves suggèrent qu’elles peuvent remplacer des fonctions écologiques perdues.

En l’occurrence, ici, l’étude souligne que les équidés sauvages peuvent augmenter la disponibilité de l’eau dans les zones arides avec des effets associés sur une variété d’espèces animales et végétales.