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Crédits : European Wilderness Society

Une chercheuse du GIEC crée le Laboratoire mondial de la sobriété

Yamina Saheb est experte au sein du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). C’est par ailleurs elle qui avait au préalable réussi à imposer le terme de sobriété dans le dernier rapport du GIEC. La chercheuse vient de créer le Laboratoire mondial de la sobriété. 

La sobriété, une notion méconnue et vivement critiquée

Durant l’été 2022, le président Emmanuel Macron avait lancé un plan de sobriété énergétique pour faire face à la menace de coupures d’électricité en France. Or, ce plan était synonyme d’une réduction de la consommation de 10 % à l’échelle nationale. Le terme sobriété a toutefois une portée plus longue, comme l’affirmait l’experte du GIEC Yamina Saheb dans une interview accordée au média Novethic le 10 mars 2024.

Selon cette analyste, cela fait référence à des politiques publiques et des pratiques du quotidien qui permettent d’éviter en amont la demande en ressources naturelles, de garantir le bien-être et une vie décente pour tous, et ce, tout en respectant les limites planétaires et pas seulement celles du budget carbone. Sans ces motivations, il n’est plus vraiment question de sobriété, mais de greenwashing, un phénomène qui nuit grandement aux transitions énergétique et écologique.

Il s’avère que Yamina Saheb a réussi à imposer le terme de sobriété et surtout sa définition dans le dernier rapport du GIEC de 2022. La chercheuse avait même constaté que la notion était présente seulement en France, si bien qu’à l’échelle mondiale, il n’existait aucun scénario de sobriété. Les travaux de Yamina Saheb au sein du GIEC concernant la sobriété ont par ailleurs reçu de nombreuses remarques négatives, principalement de la part de pays tels que l’Arabie Saoudite et les États-Unis.

Yamina Saheb GIEC
Yamina Saheb, experte du GIEC à l’origine du Laboratoire mondial de la sobriété. Crédits : Canopea / Facebook

Un problème présenté à l’envers

L’analyste estime que plusieurs obstacles peuvent entraver de réelles politiques de sobriété. Citons notamment le fait de réduire cette notion à l’aspect énergétique, et donc aux changements de comportement, une charge mentale que les citoyens portent finalement sur leurs épaules. Or, ils sont déjà enfermés dans des normes sociales dictées par les autorités, mais aussi l’industrie (ex. : la voiture).

De plus, le problème semble être présenté à l’envers. Yamina Saheb estime qu’au lieu de s’appuyer sur le modèle existant pour élaborer des scénarios de transition incluant par exemple des alternatives aux énergies fossiles, il faudrait réfléchir en premier lieu à des scénarios qui permettent de garantir la continuité de la vie sur Terre dans les limites planétaires. Or, de tels scénarios iraient bien au-delà de l’aspect énergétique.

Afin de soutenir cette idée, Yamina Saheb et ses collaborateurs ont créé le Laboratoire mondial de la sobriété, basé à Paris. Son premier objectif est de publier un Rapport sur les écarts de suffisance pour l’Europe d’ici l’automne 2024. Par ailleurs, le mot sobriété a eu sa place dans un rapport de prospective de la Commission européenne publié en 2023. En revanche, la notion a été rejetée pour une possible intégration dans l’Objectif de l’UE en matière de climat pour 2040.

Yohan Demeure

Rédigé par Yohan Demeure

Licencié en géographie, j’aime intégrer dans mes recherches une dimension humaine. Passionné par l’Asie, les voyages, le cinéma et la musique, j’espère attirer votre attention sur des sujets intéressants.