Des chercheurs ont refroidi un objet au-delà de la «limite quantique»

Crédits : Teufel/NIST

Une équipe de chercheurs a réussi à refroidir en laboratoire un tambour mécanique microscopique de vingt micromètres de longueur à une température de -273,1496 degrés Celsius, soit 10 000 fois plus froide que le vide de l’espace. C’est l’objet le plus froid jamais enregistré.

Au voisinage du zéro absolu de température, la matière se transforme en adoptant des comportements que notre intuition a de la peine à appréhender. Le royaume du froid inspire et constitue aujourd’hui un nouveau domaine de recherche : la Physique des très basses températures. Des chercheurs de l’Institut national américain des normes et de la technologie (NIST) affirment aujourd’hui dans une étude parue dans la revue Nature avoir refroidi dans un laboratoire du Maryland (États-Unis) un objet à -273,1496 degrés Celsius, tout proche du zéro absolu (-273,15 degrés Celsius, la température théorique la plus basse que l’on puisse rencontrer dans l’univers. À ce stade, il n’y a plus aucun mouvement des atomes).

« C’est beaucoup plus froid que n’importe quelle température naturelle retrouvée n’importe où dans l’Univers », a déclaré John Teufel qui a participé à l’étude. « Les résultats ont été une surprise totale pour tous les experts du domaine », ajoute José Aumentado dans un communiqué de presse. « Cette nouvelle technique est si puissante qu’elle pourrait théoriquement être utilisée pour refroidir les objets au zéro absolu. Elle ouvre la porte à la construction d’instruments d’une sensibilité sans précédent et à une meilleure compréhension de la mécanique quantique — l’une des branches les plus mystérieuses de la physique ».

Rappelons que tout dans l’univers est en mouvement. Même l’objet le plus apparemment impassible bourdonne d’activité interne. Habituellement, lorsque les chercheurs refroidissent des objets, ces derniers utilisent des lasers pour ralentir le mouvement des atomes, ce qui amortit les vibrations thermiques se produisant dans un matériau. Plus la lumière laser est organisée, mieux elle peut refroidir une surface. Au lieu de s’écouler dans un flux continu, elle (les photons) se déplace en paquets discrets appelés quanta. Chaque quantum « donne un petit coup de pied » aux atomes ce qui libère un peu de chaleur à chaque fois, d’où les difficultés à obtenir une température proche du zéro absolu. Pour cette étude, les chercheurs ont « pressé », « comprimé » deux lasers, en utilisant un type particulier de circuit supraconducteur pour produire un faisceau lumineux dans lequel les quanta étaient forcés de se suivre d’une manière ordonnée. Cela n’a pas éliminé tous les « coups de pied » pour tenter de vulgariser, mais les contraintes ont été largement atténuées. Ils ont ainsi pu obtenir un objet un million de fois plus froid que la température ambiante, 10 000 fois plus froide que le vide de l’espace et plus froide que n’importe quel objet dans l’univers.

Les physiciens s’intéressent au super-refroidissement pour deux raisons. Tout d’abord parce que si vous pouvez supprimer l’énergie thermique d’un objet, il devient alors beaucoup plus sensible aux perturbations extérieures. Des chercheurs comme ceux de LIGO (le laboratoire qui a détecté les ondes gravitationnelles l’an dernier) veulent que leurs instruments soient aussi froids que possible afin qu’ils puissent être sûrs que de petites fluctuations soient le résultat de vastes forces cosmiques et non seulement l’œuvre d’ennuyeux mouvements thermiques. De plus, éliminer la distraction du mouvement thermique d’un objet permet aux scientifiques de voir enfin le mouvement qui résulte de l’énergie quantique, donnant ainsi un aperçu des forces qui dictent l’univers à l’échelle atomique et subatomique.

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