Dans l’histoire du règne animal, notre cousin le plus ancien n’était ni une éponge, ni une anémone de mer, mais un cténophore : un petit carnivore marin, transparent et gélatineux. C’est en tout cas ce que révèle une étude publiée dans la revue Nature Ecology & Evolution.
Pour avoir la chance de pouvoir figurer sur l’arbre généalogique du règne animal, il suffit de répondre aux critères suivants : être composé de plusieurs cellules possédant un noyau, être généralement mobile et devoir se nourrir de matière organique pour survivre. Tels sont les critères qui distinguent les animaux de toutes les autres formes de vie et qui rassemblent des millions d’espèces toutes aussi différentes les unes que les autres. Mais quelle fut la première, la pionnière ? Ce débat dure depuis plus d’un siècle. Jusqu’il y a peu, la plupart des biologistes évolutionnistes pensaient que les éponges de mer (Porifera) étaient nos plus anciennes cousines en raison de leur simplicité biologique inhérente. Mais ces éponges ne semblent pas être les plus anciennes formes de vie animale.
Une étude récente publiée dans la revue Nature Ecology & Evolution pourrait bien renverser l’un des aspects les plus controversés de la théorie de l’évolution en pointant du doigt les Cnétophores, et leurs petits cils locomoteurs. À priori plus « complexes », disposant d’un système nerveux et de muscles contrairement aux premières éponges, les cténophores seraient néanmoins la première lignée à avoir divergé. Ces résultats, déjà avancés en 2008 puis en 2013, avaient à l’époque suscité la controverse au sein de la communauté scientifique. Cette fois-ci, une équipe de chercheurs menée par le biologiste Antonis Rokas, de l’Université Vanderbilt, explique dans la revue Nature avoir spécialement conçu un nouveau type d’analyse génétique pour tenter de régler la question une fois pour toutes.
Car, en plus de la portée symbolique de ces résultats (nous descendons tous de cette créature), ces nouvelles données pourraient en effet permettre de résoudre certaines contradictions dans le domaine de la phylogénomique, l’étude de la biologie évolutive intégrant les données génomiques : « La méthode actuelle consiste à recueillir de grandes quantités de données génétiques, d’analyser ces données, d’établir des relations et de faire valoir que leurs conclusions sont correctes en raison de diverses améliorations qu’ils ont faites dans leur analyse », explique Antonis Rokas. « Cela a très bien fonctionné dans 95 % des cas, mais la technique aura conduit à des différences apparemment irréconciliables dans les 5 % restants ».
Jusqu’à présent, l’idée consistait donc à construire un arbre généalogique « plausible » grâce à l’ensemble des données génomiques recueillies. Ici, l’équipe de chercheurs s’est concentrée sur la comparaison des gènes partagés par tous les organismes. En analysant des centaines de milliers de gènes séquencés d’organismes ciblés pour tenter de résoudre les problèmes d’hérédité animale, ils ont alors déterminé que les Cnétophores représentaient la branche la plus ancienne de l’arbre généalogique des animaux.