Les fonds ocĂ©aniques regorgent de mystères, mais aussi de chaleur. Une Ă©tude a montrĂ© Ă ce titre qu’une large partie de l’excès d’Ă©nergie stockĂ© dans les eaux de l’Atlantique Nord se situe en profondeur. Les rĂ©sultats ont Ă©tĂ© publiĂ©s dans la revue Communications Earth & Environment le 17 mai 2022.
L’altération de la concentration atmosphérique en gaz à effet de serre par les activités humaines conduit à une accumulation de chaleur dans le système climatique. Toutefois, seul 1 % de cet excès d’énergie est impliqué dans l’augmentation de température de l’atmosphère. Le reste, plus de 90 %, va aller réchauffer l’immense masse d’eau qui couvre les deux tiers de la surface du globe.
La circulation océanique, grande redistributrice de chaleur
Cette Ă©lĂ©vation de tempĂ©rature ne se cantonne pas Ă la surface des ocĂ©ans, mais s’étend en profondeur. NĂ©anmoins, la rĂ©partition de chaleur Ă l’intĂ©rieur des masses d’eau n’est pas homogène, loin s’en faut. En effet, la circulation ocĂ©anique va redistribuer l’excès d’énergie et augmenter le contenu thermique de certaines couches au dĂ©triment des autres. Ces fluctuations ont des consĂ©quences fortes pour le climat de surface, comme le rythme d’élĂ©vation de la tempĂ©rature globale.
Dans l’Atlantique subtropical, à 25 °N, des chercheurs ont récemment constaté que pour la période allant de 1850 à 2020, plus de 60 % de l’excès d’énergie a été stocké dans l’océan profond, c’est-à -dire sous les 700 premiers mètres. À l’origine de cet enfouissement de chaleur, on trouve la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique (AMOC), dont font partie intégrante le Gulf Stream et la dérive nord-atlantique.
Ă€ l’extrĂŞme nord du bassin, cette circulation est caractĂ©risĂ©e par des zones de formation d’eaux profondes qui entraĂ®nent avec elles la chaleur accumulĂ©e en surface. DĂ©portĂ©e dans l’ocĂ©an profond, parfois jusqu’Ă plus de 3500 mètres, celle-ci se trouve temporairement isolĂ©e de toute interaction avec l’atmosphère. Aussi, les rĂ©sultats rĂ©vèlent encore une fois le rĂ´le majeur jouĂ© par l’AMOC dans le transfert de chaleur entre les diffĂ©rentes couches ou rĂ©gions ocĂ©aniques.
« Alors que notre planète se rĂ©chauffe, il est essentiel de comprendre comment l’excès de chaleur absorbĂ© par l’ocĂ©an est redistribuĂ© Ă l’intĂ©rieur de ce dernier, depuis la surface jusqu’au fond, et il est important de prendre en compte l’ocĂ©an profond pour Ă©valuer l’accroissement du dĂ©sĂ©quilibre Ă©nergĂ©tique de la Terre », rapporte Marie-JosĂ© Messias, auteur principal de l’étude.
« En plus de dĂ©couvrir que l’ocĂ©an profond retient une grande partie de cet excès de chaleur, nos recherches montrent comment les courants ocĂ©aniques la redistribuent dans diffĂ©rentes rĂ©gions », ajoute le chercheur. « Nous avons constatĂ© que cette redistribution Ă©tait un facteur clĂ© du rĂ©chauffement dans l’Atlantique Nord ».