Cette incroyable expĂ©rience a prouvĂ© l’existence de l’horloge circadienne chez les humains

Michel Siffre
Crédits : capture YouTube / Archives

Au dĂ©but des annĂ©es 1960, le gĂ©ologue français Michel Siffre a menĂ© une expĂ©rience hors du commun. Le but ? Prouver qu’il existe une horloge interne chez les humains, imposant un rythme de 24 heures Ă  leur organisme.

Qu’est-ce que l’horloge circadienne ?

L’horloge circadienne soumet notre organisme Ă  un cycle de 24 heures. Elle rĂ©gule des fonctions très diverses telles que la tempĂ©rature corporelle, la pression artĂ©rielle, la production d’hormones, la frĂ©quence cardiaque et surtout le système veille/sommeil. Cela joue Ă©galement un rĂ´le sur nos capacitĂ©s cognitives, notre humeur ou encore notre mĂ©moire.

Pratiquement toutes les fonctions biologiques sont soumises Ă  ce rythme. Par exemple, l’horloge circadienne fait que la sĂ©crĂ©tion de mĂ©latonine dĂ©bute dès la fin de journĂ©e pour un sommeil plus profond durant la nuit. La tempĂ©rature du corps est plus basse tĂ´t le matin et plus Ă©levĂ©e en journĂ©e et les contractions intestinales baissent la nuit. L’Ă©veil est Ă  son maximum du milieu de la matinĂ©e jusqu’en fin d’après-midi et se renforce pendant le sommeil.

horloge circadienne
Crédits : Lamiot / Wikipedia

Une expérience hors du commun

Au dĂ©but des annĂ©es 1960, l’affaire fait grand bruit : Michel Siffre, jeune gĂ©ologue français de 23 ans est extrait par des spĂ©lĂ©ologues du gouffre de Scarasson, dans le massif du Marguareis (Alpes Ligures). En pleurs et complètement Ă©puisĂ©, l’intĂ©ressĂ© vient d’effectuer une expĂ©rience scientifique qui sort de l’ordinaire. Celle-ci viendra apporter des informations cruciales dans un domaine encore peu explorĂ© : la chronobiologie.

Le 17 juillet 1962, Michel Siffre entre dans le gouffre sans repères temporels. Il n’embarque donc aucune montre ou radio. Après trois heures de descente, le scientifique installe sa tente Ă  une profondeur d’environ 100 mètres oĂą la tempĂ©rature est de 3°C et l’hygromĂ©trie de 98 %. Il y fait donc très froid, très humide, mais Ă©galement très sombre. Michel Siffre y restera deux mois complets avant de revoir la lumière du jour.

Pour le gĂ©ologue, ces conditions sont selon lui idĂ©ales afin d’Ă©tudier les rĂ©actions physiologiques et Ă©videmment l’Ă©volution du rythme veille-sommeil en l’absence de tout repère temporel. Toutefois, l’homme dispose tout de mĂŞme d’un seul moyen de communication avec l’extĂ©rieur Ă  savoir une ligne tĂ©lĂ©phonique, dont il se servira notamment pour donner des informations sur le dĂ©but et la fin de chacun de ses cycles de sommeil et prises de repas.

horloge

Rythme décalé et perte de mémoire

Durant ces deux mois, l’humiditĂ© glaciale est le principal ennemi de Michel Siffre. Cette dernière envahit tout : sa tente, son duvet, ses vĂŞtements et son tapis de sol. Rapidement, le gĂ©ologue entre dans un Ă©tat de semi-hibernation. Il perd alors toute notion de l’alternance des jours et des nuits. L’Ă©quipe qui suit l’avancĂ©e de son expĂ©rience comprend alors que le rythme biologique du chercheur subit un dĂ©calage. En effet, l’intĂ©ressĂ© se couche et se rĂ©veille un peu plus tard chaque jour. Ă€ terme, son rythme s’est inversĂ© par rapport Ă  celui de la surface.

Michel Siffre est Ă©galement en proie Ă  des altĂ©rations de la mĂ©moire. Il a gĂ©nĂ©ralement du mal Ă  se souvenir de ce qu’il a mangĂ© durant la journĂ©e et son Ă©quipe a Ă©tĂ© surprise de le voir passer un disque de Luis Mariano une dizaine de fois de suite ! Par ailleurs, lors de sa sortie le 14 septembre 1962, Michel Siffre pense ĂŞtre le 20 aoĂ»t. Ainsi, le temps que le gĂ©ologue a perçu l’intĂ©rieur s’est dĂ©roulĂ© pratiquement deux fois moins rapidement.

Cette expĂ©rience extrĂŞme a donnĂ© lieu Ă  une dĂ©couverte importante et surtout universelle. Peu importe ses temps de veille et de sommeil, le chercheur s’est rĂ©veillĂ© toutes les 24h30, montrant l’existence d’une horloge circadienne chez les humains. En effet, ce rythme vital est toujours lĂ , mĂŞme en l’absence de repères temporels. Enfin, Michel Siffre effectuera deux autres expĂ©riences similaires en 1972, dont la dernière en 1999 Ă  l’âge de 60 ans.