En Suisse, des neuroscientifiques ont démontré que voir un avatar malade en réalité virtuelle (VR) pouvait mettre notre organisme en alerte. Lorsque ceci se produit, il devient question d’une activation de réseaux cérébraux spécifiques et d’une apparition de cellules immunitaires sentinelles dans le sang. Selon les chercheurs, l’organisme procède ainsi pour tenter d’anticiper une infection à venir.
Des avatars virtuels « neutres », « anxiogènes » et « infectés »
Habituellement, le système immunitaire détecte et réagit à la présence d’un agent pathogène dans le but de l’éliminer ou de contrer ses effets néfastes. Néanmoins, le temps assez conséquent que prend ce processus – environ une heure et demi – peut avoir un impact sur son efficacité. Des chercheurs neuroscientifiques du MySpace lab de l’Université de Lausanne (Suisse) ont récemment démontré que le cerveau est capable de détecter une « infection virtuelle » et d’activer le système immunitaire, sans que l’organisme ne fasse réellement l’objet d’une exposition à un agent pathogène.
Comme le montre l’étude publiée dans la revue Nature Neuroscience en juillet 2025, les chercheurs ont utilisé la réalité virtuelle sur des volontaires afin de simuler un risque d’infection. Trois cohortes de participants ont d’abord été exposés à des avatars virtuels « neutres », avant une deuxième séance ajoutant de manière aléatoire des avatars « anxiogènes » et d’autres considérés comme « infectés », dont les visages montraient clairement des signes d’infection.
Évidemment, certains avatars ont suscité du dégout, un facteur clé des réactions d’évitement, surtout que ceux-ci pénétraient plus ou moins profondément l’espace péripersonnel des volontaires – la zone immédiate autour du corps où se préparent l’anticipation et les réactions aux interactions avec l’environnement et ce, grâce à l’intégration multisensorielle. Les auteurs de l’étude ont ensuite classé les participants selon des seuils de dégout mais également, d’anxiété.

Un niveau de réponse similaire à celui résultant d’un contact réel
Après cette exposition aux avatars virtuels, les meneurs de l’étude ont mesuré les réponses neuronales, comportementales et immunitaires des volontaires via plusieurs méthodes dont l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle, la psychophysique et l’électroencéphalographie, entre autres. Ensuite, les chercheurs ont effectué de multiples comparaisons, entre les réponses aux avatars montrant des signes d’infection, les « anxiogènes », les « neutres » mais également, les réponses face à un contact réel avec un agent pathogène – par exemple via l’injection d’un vaccin contre la grippe.
Selon les résultats, le type d’avatar utilisé déterminait l’évolution de l’effet espace péripersonnel entre la première et la deuxième séance. Il s’avère que dans le cas des avatars « infectés », cet effet s’est produit à chaque fois, peu importe le degré de pénétration de l’espace péripersonnel des volontaires. Ici, le niveau de réponse est similaire à celui résultant d’un contact réel entre l’organisme et un agent pathogène. Par ailleurs, les auteurs de l’étude ont affirmé que ce type de réponse impliquait les aires cérébrales fronto-pariétales, une zone du cerveau détectant justement l’invasion de l’espace péripersonnel. Vient ensuite une altération de la connectivité au sein de l’hypothalamus, un élément clé de l’interface neuro-immunitaire, déclenchant des changements dans le comportement, dont l’activation du système immunitaire et plus précisément, celle des cellules lymphoïdes innées (ILC).
En conclusion, les chercheurs estiment que les systèmes neuronal et immunitaire agissent ensemble pour anticiper une menace d’infection, même en l’absence de contact physique. Si davantage de travaux doivent être menés pour obtenir plus de certitudes, les scientifiques disposent désormais d’une piste très intéressante pour étudier l’interface dite « anticipatoire », entre perception, cognition et immunité.
