Des fouilles menées entre 1994 et 2010 dans l’est d’Alep, en Syrie, ont révélé une trouvaille étonnante. Parmi des objets de l’âge du bronze ancien, des archéologues ont découvert quatre petits cylindres d’argile gravés de ce qui pourrait être le plus ancien alphabet jamais trouvé. Ces artefacts, vieux de 4 400 ans, bouleversent les hypothèses traditionnelles sur l’origine de l’écriture alphabétique et ouvrent une nouvelle fenêtre sur l’évolution de la communication humaine.
Une découverte extraordinaire sur un site antique
Le site de Tell Umm-el Marra, à l’ouest de la Syrie, est une ancienne colonie urbaine fondée vers 2700 avant J.-C. Les fouilles, menées par une équipe conjointe des universités Johns Hopkins (États-Unis) et d’Amsterdam (Pays-Bas), ont révélé une tombe bien conservée contenant des trésors variés : bijoux en or et argent, ustensiles de cuisine, pointes de lance et poteries.
Toutefois, ce sont quatre petits cylindres d’argile, à première vue modestes, qui ont attiré l’attention des chercheurs. Perforés et gravés, ils étaient peut-être attachés à des objets pour servir d’étiquettes. Leur importance ne réside pas seulement dans leur ancienneté, mais dans la nature des inscriptions qu’ils portent, lesquelles pourraient représenter une forme primitive d’alphabet.
L’importance de cette découverte pour l’histoire de l’écriture
Jusqu’à présent, les chercheurs s’accordaient à dire que le premier alphabet connu avait été inventé dans la région égyptienne vers 1900 avant J.-C. Il était utilisé par les ouvriers cananéens qui travaillaient pour les Égyptiens et a marqué une étape révolutionnaire dans l’histoire de l’écriture. Alors que les systèmes précédents nécessitaient des années de formation pour être maîtrisés, les alphabets ont en effet permis à des populations plus larges d’apprendre à lire et écrire. Ils ont aussi facilité la conservation d’informations, la transmission de connaissances et le commerce sur de longues distances.
Cependant, les cylindres de Tell Umm-el Marra datent de 2400 avant J.-C., soit 500 ans plus tôt. Cela suggère que l’écriture alphabétique aurait pu émerger ailleurs, dans une région différente et à une époque bien antérieure à ce que l’on pensait.
Une origine alternative pour l’alphabet ?
Les implications de cette découverte vont au-delà de l’ancienneté des artefacts. Si l’alphabet a vu le jour en Syrie plutôt qu’en Égypte, cela remet en question les hypothèses établies sur la diffusion culturelle dans le monde antique. Tell Umm-el Marra se situait à un carrefour des échanges commerciaux et culturels, ce qui en faisait un lieu propice à l’innovation.
Cependant, de nombreuses questions restent sans réponse. Le contenu des inscriptions gravées sur les cylindres demeure un mystère, car l’écriture n’a pas encore été déchiffrée. Est-ce un alphabet rudimentaire ou une expérimentation isolée qui n’a pas mené à un système durable ?
Cette découverte soulève donc plus de questions qu’elle n’en résout, mais elle représente une avancée majeure pour l’archéologie et l’étude des origines de l’écriture. Les chercheurs espèrent que des fouilles futures dans la région permettront de trouver d’autres exemples similaires qui pourraient éclairer davantage cette période fascinante de l’histoire humaine.