Il y a quelques années, un paléontologue est tombé sur le fossile d’une ancienne araignée non identifiée dans des strates du Carbonifère supérieur situées près d’Osnabrück en Basse-Saxe, en Allemagne. Le mystérieux spécimen vient de faire l’objet d’une analyse par le Dr Jason Dunlop, l’expert en fossiles d’arachnides, qui nous révèle son étonnante identité.
Un nouveau fossile du Carbonifère
Les araignées (Araneae) sont un groupe familier et omniprésent d’arthropodes prédateurs que l’on trouve aujourd’hui dans la plupart des écosystèmes terrestres. Plus de 51 000 espèces existantes sont en effet complétées par un registre fossile relativement riche de 1427 espèces éteintes. Malgré tout, les araignées carbonifères sont encore assez rares. On dénombre jusqu’à présent un peu plus d’une dizaine d’espèces, d’où l’importance de cette découverte.
Le fossile provient d’une strate qui date de 310 à 315 millions d’années. Rappelons qu’à cette époque, la Terre était surtout recouverte de vastes marécages et de forêts denses composées principalement de fougères arborescentes, de lycopodes géants, de prêles et d’autres plantes primitives. La décomposition partielle de ces végétaux, qui prospéraient dans des conditions climatiques chaudes et humides, avait alors entraîné la formation de vastes dépôts de matière organique qui ont été soumis au fil du temps à une pression considérable. Depuis, cette matière organique s’est transformée en charbon qui est aujourd’hui une source importante d’énergie fossile.
Dans une analyse relatée dans la revue PalZ, il ressort que cette araignée représente une nouvelle espèce. Elle vient d’être nommée Arthrolycosa wolterbeeki en l’honneur de son découvreur : le Dr Tim Wolterbeek, de l’Université d’Utrecht. Il s’agit également de la première araignée paléozoïque jamais découverte en Allemagne.
Des archives encore limitées
Malgré cette nouvelle découverte, la diversité des espèces d’araignées carbonifères reste assez faible par rapport à celle des arachnides étroitement apparentés comme les arachnides du genre Phalangiotarbida et les Trigonotarbida (respectivement deux et quatre fois plus).
Selon les chercheurs, cela pourrait s’expliquer par les similitudes de cette nouvelle espèce avec les araignées mésothèles existantes. Si elles étaient écologiquement similaires et partageaient le même mode de vie de terrier, cela aurait pu limiter leurs possibilités de fossilisation, car ils auraient rarement été en contact avec les plans d’eau nécessaires à leur préservation.
Si l’on poursuit cette idée, il serait alors logique que les quelques spécimens découverts datant du carbonifère soient des mâles dans la mesure où les femelles existantes sont en grande partie sédentaires. Une fois la maturité atteinte, nous savons en effet que les mâles s’aventurent « en dehors des sentiers battus » à la recherche de partenaires potentielles. A priori, les probabilités pour que les mâles soient préservés dans les archives fossiles sont donc plus grandes. Pourtant, il est intéressant de noter que ni le spécimen actuel, ni aucune des autres araignées carbonifères ne conserve d’organe palpien mâle.
La découverte d’Arthrolycosa wolterbeeki met en lumière un aspect intrigant de l’évolution des araignées, notamment leur adaptabilité et leur diversification au cours des âges géologiques. Cette espèce, avec ses caractéristiques primitives et son environnement carbonifère, nous rapproche un peu plus des ancêtres des araignées modernes. Elle soulève également des questions sur les interactions écologiques et les stratégies de survie de l’époque, offrant ainsi aux chercheurs une rare opportunité d’étudier l’origine et les adaptations des araignées dans un monde dominé par des climats tropicaux et des paysages marécageux. Ce fossile exceptionnel ouvre la voie à de futures recherches, visant à reconstituer la diversité biologique du Carbonifère et les conditions qui ont permis la fossilisation de ces créatures remarquables.