Ces glaciers du Groenland refluent plus vite qu’on ne pensait

Crédits : Wikimedia Commons.

C’est une nouvelle dont on se serait bien passé. En effet, selon les données issues d’un nouveau modèle d’écoulement glaciaire, certains glaciers du Groenland reflueraient à un rythme plus élevé que ne le laissaient entrevoir les estimations précédentes. Les résultats ont récemment été publiés dans la revue scientifique Geophysical Research Letters.

Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont développé une paramétrisation novatrice basée sur des mesures in situ de la quantité d’eau de fonte s’échappant de la langue terminale du glacier LeConte en Alaska, ainsi que sur la physique spécifique des fronts glaciaires groenlandais et sur les propriétés thermohalines de l’eau qui les environne.

La fonte sous-marine joue les trouble-fêtes

Comme souvent, c’est l’ampleur de la fonte sous-marine, autrement dit celle qui se produit à la base des langues glaciaires posées sur l’eau, qui fait tout le sel de l’affaire. Quantifier l’ampleur de ce processus n’est pas une mince affaire. En effet, celui-ci se produit à l’abri de regards, parfois à plusieurs centaines de mètres sous la surface des flots.

« Pendant des années, les gens ont pris un modèle de vitesse de fonte des glaciers flottants de l’Antarctique et l’ont appliqué aux fronts glaciaires verticaux du Groenland. C’était la meilleure chose que nous pouvions faire compte tenu des observations limitées », relate Kirstin Schulz, coauteure de l’étude. « Si c’était faux ou vrai, qui savait ? Mais il y a de plus en plus de preuves montrant que l’approche traditionnelle produit des taux de fonte trop faibles sur les fronts verticaux des glaciers du Groenland ».

glacier groenland
Crédits : capture vidéo / NASA.

Le manque de données pour les glaciers du Groenland tient à la présence de fronts glaciaires particulièrement abrupts et instables qui ont maintenu les chercheurs à distance pour des raisons de sécurité des personnes et des biens. En Antarctique, ces mêmes fronts demeurent plus stables, ce qui explique pourquoi les schémas numériques traditionnels reposent sur des données acquises en périphérie du continent blanc.

Le recul des fronts glaciaires du Groenland revu à la hausse

Grâce aux données de terrain récoltées à moins de 400 mètres du front du glacier LeConte, ce qui est une proximité inédite, les chercheurs ont pu développer un modèle spécifiquement dédié à la dynamique bien particulière de ce type de glacier. En effet, aucun autre modèle ne pouvait rendre compte de la vitesse à laquelle le front du glacier en question recédait. Par rapport aux simulations numériques, la réalité faisait état d’un recul environ cent fois plus rapide.

Aussi, les résultats attirent l’attention sur la rapidité stupéfiante à laquelle certains fronts glaciaires reculent sous l’effet du réchauffement de l’eau. Les chercheurs espèrent désormais intégrer leur paramétrisation novatrice à un modèle climatique afin de voir à quel point la prise en compte de ce processus aggrave les projections d’élévation du niveau des mers pour différents scénarios de réchauffement climatique.

« Les résultats des modèles climatiques océaniques sont très pertinents pour l’humanité en termes de prévision des tendances associées au changement climatique, vous voulez donc vraiment les concevoir correctement », rapporte Kirstin Schulz. « C’est une étape très importante pour améliorer les modèles climatiques ».