Tout le monde a déjà ressenti la peur au moins une fois dans sa vie. Il s’agit là d’un mécanisme de survie qui « se doit d’être contagieux », selon un spécialiste du sujet. Autrement dit, la peur est un réflexe collectif, capable de se transmettre inconsciemment entre les individus dans le but de réagir ensemble face à des menaces physiques.
Signal collectif, vigilance partagée
Rappelons tout d’abord le fait que la peur est une émotion primaire se manifestant en présence – ou en anticipation – d’un danger réel ou perçu, sur le point de se produire ou non. Élément clé des mécanismes de survie, la peur est profondément présente dans le patrimoine génétique des humains et ce, même si les sociétés actuelles ne nous confrontent pas aux mêmes dangers auxquels étaient exposés les humains durant la Préhistoire.
Dans un article publié le 21 octobre 2025, le média Popular Science a interrogé Arash Javanbakht, psychiatre et neuroscientifique à l’école de médecine de l’Université d’État de Wayne à Detroit (Etats-Unis) et auteur de l’ouvrage Afraid (2023). L’expert a longuement évoqué le caractère contagieux de la peur. Or, les exemples ne manquent pas. Dans un avion, une seule personne se laissant aller à la peur est susceptible de faire monter la tension chez les individus à proximité. Même chose au sein d’une foule lorsqu’une personne réagit à un danger.
Aujourd’hui encore, l’humain est donc très sensible à la peur des autres. Ce sentiment prend racine il y a 150 000 ans, lorsque Homo sapiens cohabitait encore avec l’homme de Néandertal. Déjà à l’époque, la peur incarnait une sorte de signal collectif, une vigilance partagée dont le but était d’assurer la survie du groupe. Ce sentiment s’activait par exemple lorsque des chasseurs s’aventuraient pour traquer du gibier et ce, en connaissance des risques de rencontrer d’autres prédateurs redoutables tels que les lions et les léopards, entre autres.

Une « contagion » qui s’explique scientifiquement
Lorsqu’un individu perçoit la peur chez une autre personne, son amygdale s’active instantanément. Il s’agit là d’une zone du cerveau jouant un rôle crucial dans la perception et le traitement des émotions, notamment le plaisir, l’anxiété et évidemment, la peur. Elle fait office de système d’alerte capable de déclencher des réactions physiologiques et comportementales rapides face au danger (ex : sursaut, fuite etc.). Ces réactions se produisent après que l’amygdale transmette un signal à l’hippocampe, activant ainsi le système nerveux et libérant de l’adrénaline, responsable d’une accélération du rythme cardiaque.
Comme au sein de nombreuses espèces animales sociales, la peur se propage chez les humains par imitation. Cependant, l’évolution nous a permis de lire plus finement cette peur, en fonction de signes comme les postures et les expressions faciales. Il est donc ici question d’un genre de caisse de résonance émotionnelle, permettant de comprendre la peur d’autrui tout en ressentant cette même peur. De plus, il s’avère que « contagion » va encore plus loin, des études ayant démontré qu’il était possible de développer la peur d’un objet en particulier simplement en observant les réactions d’autres personnes.
La peur a t-elle une « odeur » ?
Dans la nature, certains animaux libèrent des substances chimiques dans l’air en cas de danger : les phéromones d’alerte. L’objectif est de prévenir les autres individus du groupe, afin de leur permettre d’augmenter leurs chances de survie. Longtemps, la Science pensait que l’être humain était incapable d’une telle chose, car notre organe voméronasal – permettant de détecter ces phéromones – est inactif.
Cependant, des biologistes ont montré au début des années 2000 que le cerveau humain pouvait détecter certaines molécules présentes dans la transpiration En lien avec le stress et la peur, ces molécules prennent le nom de chimiosignaux. Plus tard, d’autres travaux ont montré que le cerveau était capable de reconnaître les signaux chimiques de la peur et y réagir, même sans perception consciente.
Enfin, il faut savoir que trois facteurs principaux régissent la peur et la contagion de cette peur chez les individus : leur génétique, leur capacité à se montrer empathique et leurs expériences. Ainsi, les personnes ayant vécu des événements tragiques ou difficiles peuvent transmettre cette sensibilité à la peur à leurs descendants. Ceci démontre que tout le monde n’est pas sur le même pied d’égalité quant à la perception de la peur.
