Sous les fondations d’une demeure vieille de 1 500 ans, au cœur du site de Løsning Søndermark, au Danemark, des archéologues ont mis au jour une découverte exceptionnelle : un véritable arsenal militaire composé de plus d’une centaine d’armes parmi lesquelles des épées, des lances, des javelots et un casque romain d’une rareté inestimable. Cette trouvaille, révélée en novembre 2024 et février 2025, offre un nouvel éclairage sur les structures de pouvoir et les pratiques guerrières de l’âge du fer. Pourquoi ces armes ont-elles été soigneusement enfouies sous la demeure d’un chef ? S’agit-il d’une offrande rituelle, d’un butin de guerre ou d’un dépôt stratégique ?
Une collection d’armes unique en son genre
Les fouilles, menées dans le cadre d’un projet d’élargissement d’une autoroute, ont mis au jour 119 lances et javelots, huit épées, cinq couteaux, une hache et une cotte de mailles extrêmement rare. Le simple fait qu’une cotte de mailles ait été retrouvée est une découverte en soi. Très peu d’exemplaires de ce type d’armure ont en effet survécu en Scandinavie.
Toutefois, l’élément le plus remarquable reste sans doute le casque romain, le premier du genre à être mis au jour au Danemark. Très abîmé par le temps, il a néanmoins révélé ses secrets grâce à l’imagerie aux rayons X, ce qui a permis aux chercheurs d’identifier une plaque de nuque et une plaque de joue décorée.
Un chef puissant et influent
La quantité et la qualité des objets retrouvés indiquent clairement que cette maison appartenait à un personnage important. Les armes, la cotte de mailles, le casque et d’autres objets comme des anneaux de serment en bronze (symboles de pouvoir à l’âge du fer) suggèrent qu’il s’agissait d’un chef de guerre capable de lever une armée.
De plus, des fragments de bride de cheval et un clairon ont été retrouvés sur le site, ce qui renforce l’hypothèse d’un chef chevauchant à la tête de ses hommes et utilisant des instruments sonores pour coordonner les batailles.
Cette découverte n’est pas isolée : un autre trésor similaire a en effet été mis au jour à Vindelev, à seulement seize kilomètres du site de Løsning. Il semble donc que cette région ait été un foyer de pouvoir et d’influence à l’âge du fer.
Sacrifice militaire ou simple butin ?
Au cinquième siècle après J.-C., le Danemark se trouvait à la frontière de la Grande Germanie, une région peuplée de tribus que les Romains décrivaient comme redoutables. Certains guerriers germaniques servaient dans les armées romaines en tant qu’auxiliaires (soldats non romains recrutés pour combattre aux côtés des légionnaires). Il est donc possible que ce casque ait appartenu à un chef de guerre germanique qui a combattu pour Rome avant de retourner dans sa région natale.
Une autre hypothèse est que ce casque ait été pris comme trophée sur un champ de bataille lors d’un affrontement entre tribus germaniques et Romains, plus au sud de l’Europe. Dans ce cas, il aurait été un symbole de prestige pour son possesseur.
Enfin, une autre hypothèse privilégiée est celle d’un rituel sacrificiel. Dans de nombreuses cultures anciennes, il était en effet courant d’offrir aux dieux des armes ou des biens précieux après une victoire militaire. Ce dépôt pourrait donc être une offrande destinée à marquer un triomphe sur le champ de bataille et à s’attirer la faveur des divinités.


Un regard inédit sur l’âge du fer scandinave
Au-delà de la quantité impressionnante d’objets retrouvés, cette découverte offre un nouvel éclairage sur l’organisation sociale et militaire du Danemark à l’âge du fer. Elle montre que des chefs de guerre influents existaient dans la région et qu’ils étaient capables d’accumuler des richesses ainsi que de tisser des liens avec l’Empire romain.
Ces objets précieux permettent aussi de mieux comprendre les pratiques guerrières et les croyances de l’époque. Pourquoi certains objets étaient-ils enterrés ? Comment ces armes étaient-elles utilisées ? Quelle était la place du pouvoir militaire dans ces sociétés ? Autant de questions auxquelles les chercheurs tenteront de répondre grâce à l’étude approfondie de ces artefacts.