Ils détournent les gènes du cancer pour retourner les tumeurs contre elles-mêmes

cancer poumon
Crédits : Rasi Bhadramani/istock

Les traitements contre le cancer ont longtemps été entravés par la capacité des cellules cancéreuses à développer une résistance aux médicaments. Cependant, une récente percée scientifique offre un nouvel espoir en piratant l’évolution même des cellules tumorales pour les rendre vulnérables aux thérapies. Cette approche novatrice, développée par des chercheurs de l’Université d’État de Pennsylvanie, vise à inverser la capacité des cellules cancéreuses à échapper aux effets des médicaments anticancéreux.

Les défis actuels dans le traitement du cancer

Le succès des traitements contre le cancer dépend essentiellement de leur capacité à cibler et à détruire sélectivement les cellules cancéreuses tout en préservant les cellules saines. Cependant, les cellules tumorales possèdent une remarquable capacité à évoluer et à s’adapter, ce qui peut rendre les thérapies moins efficaces avec le temps. Ce phénomène, connu sous le nom de résistance aux médicaments, constitue l’un des plus grands défis dans la lutte contre le cancer.

La résistance aux médicaments anticancéreux peut se manifester de différentes manières. Par exemple, certaines cellules cancéreuses peuvent développer des mécanismes pour inactiver directement les médicaments avant qu’ils n’atteignent leur cible dans la cellule. Elles peuvent également activer des voies cellulaires internes qui contrent les effets des médicaments en favorisant leur propre survie et leur prolifération. Ces voies de signalisation peuvent modifier le métabolisme cellulaire, augmenter l’expression de protéines de survie ou inhiber l’apoptose, le processus naturel de mort cellulaire programmée induit par les traitements anticancéreux.

En conséquence, même lorsque les traitements initiaux semblent efficaces, un sous-ensemble de cellules cancéreuses peut survivre et se multiplier, conduisant éventuellement à une rechute de la maladie.

Cette capacité des cellules cancéreuses à développer une résistance aux médicaments pose un défi majeur pour les oncologues et les chercheurs qui cherchent à améliorer l’efficacité des traitements tout en réduisant les risques de rechute et de progression de la maladie. Pour surmonter ces obstacles, de nouvelles approches thérapeutiques sont nécessaires, ce qui nous ramène à ces travaux récents détaillés dans la revue Nature Biotechnology.

Une nouvelle approche : la double commutation de sélection génétique

Les chercheurs ont mis au point une stratégie innovante connue sous le nom de « double commutation de sélection génétique ». Cette méthode repose sur l’introduction de deux « gènes suicides » dans les cellules cancéreuses. Le premier gène permet aux cellules modifiées de résister à un médicament couramment utilisé contre le cancer du poumon, l’erlotinib. En rendant ces cellules résistantes à l’erlotinib, elles deviennent prédominantes par rapport aux cellules non modifiées sensibles au médicament.

Dans un deuxième temps, les chercheurs activent le deuxième gène suicide à l’aide d’une molécule inoffensive, le 5-FC. Ce gène code pour une enzyme qui convertit le 5-FC en une toxine puissante, le 5-FU, qui détruit à la fois les cellules cancéreuses modifiées et celles qui les entourent. Cette stratégie permet non seulement de cibler directement les cellules tumorales, mais aussi de surmonter la résistance développée par les cellules cancéreuses au cours du traitement.

Bien que prometteuse, cette approche nécessite cependant encore des tests approfondis sur d’autres types de cancers et thérapies. Les chercheurs envisagent d’adapter cette méthode à d’autres contextes oncologiques pour évaluer son efficacité et sa sécurité. De plus, cette technologie pourrait constituer une façon généralisable d’introduire des gènes thérapeutiques dans le cancer, ouvrant la voie à de nouvelles opportunités thérapeutiques qui pourraient révolutionner la lutte contre le cancer à l’avenir.