Pourquoi nous avons besoin d’une nouvelle façon de définir le temps sur la Lune

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Vue d'artiste de deux astronautes en combinaison spatiale travaillant sur la Lune. Crédits : NASA

La durée d’un jour terrestre est profondément ancrée dans notre sens du temps, mais comment opérer sur d’autres mondes, comme la Lune, où la durée d’une journée est complètement différente ? Pour l’Agence spatiale européenne (ESA), il est l’heure de se poser la question.

La Lune, nouveau terrain d’exploration

Chaque nouvelle mission vers la Lune est opérée sur sa propre échelle de temps exportée de la Terre. Des antennes spatiales sont utilisées pour maintenir les chronomètres embarqués synchronisés avec l’heure terrestre tout en facilitant les communications bidirectionnelles. Cependant, cette approche ne sera pas durable dans l’environnement lunaire à venir. Au cours de la prochaine décennie, la présence humaine sur et autour de la Lune sera en effet quasi permanente, à l’inverse des missions Apollo qui ne duraient à leur époque que quelques jours.

Les États-Unis seront les principaux instigateurs de cette future exploitation. Le programme Artemis prévoit en effet plusieurs missions habitées en surface permettant, in fine, une présence humaine durable sur la surface lunaire.

L’Europe aura également sa part de contribution. Elle participera notamment à la construction de la future station en orbite lunaire (Gateway), à l’intérieur de laquelle séjourneront les astronautes entre deux missions. L’Europe est également en première ligne dans le développement des capsules Orion qui permettent le transport des équipages vers la Lune. Enfin, nous savons qu’un atterrisseur lunaire européen est en cours de conception pour permettre d’assurer une série de missions différentes en surface.

Toutes ces missions à venir ne se contenteront pas d’être sur ou autour de la Lune en même temps, elles interagiront également ensemble.

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Le module de service européen près de la Lune. Crédits : ESA

Définir un carde temporel commun

Dans cette perspective, nous savons que l’ESA développe un service de communication et de navigation lunaire à travers son programme « Moonlight ». Ce système permettra aux missions de maintenir des liaisons vers et depuis la Terre. Cependant, les instruments auront également besoin d’une échelle de temps commune afin de faciliter les corrections de position.

De son côté, la NASA aura un système équivalent : le Lunar Communications Relay and Navigation System. Pour maximiser l’interopérabilité, ces deux systèmes devront donc utiliser la même échelle de temps.

En conséquence, les organisations spatiales ont commencé à réfléchir à ce sujet. Dans le cadre d’une réunion tenue en novembre dernier aux Pays-Bas, les chercheurs impliqués se sont mis d’ailleurs d’accord sur l’importance et l’urgence de définir un temps de référence lunaire commun, internationalement accepté et vers lequel tous les systèmes lunaires et utilisateurs puissent se référer.

Cela ne veut pas forcément dire que tout le monde sera à la même heure sur la Lune. Nous utilisons en effet sur Terre les fuseaux horaires efficacement en nous appuyant sur un système de références communes. Ce même principe pourrait donc être exploité pour les systèmes lunaires à venir.

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Vue d’artiste de la future station en orbite lunaire. Crédits : ESA

Pas aussi simple qu’il n’y paraît

En effet, l’un des éléments clés de la relativité générale d’Einstein est que les horloges fonctionnent à des vitesses différentes en fonction du champ gravitationnel dans lequel elles opèrent. Compte tenu de la gravité lunaire inférieure, les horloges gagneront en moyenne 56 millionièmes de seconde par jour par rapport à celles de la Terre. Cela peut sembler infime, mais additionnés, tous ces décalages pourraient entraver les futures opérations lunaires qui devront s’aligner à la microseconde.

Rappelons enfin qu’au niveau de la région équatoriale, chaque jour dure environ 29,5 jours terrestres (la durée de chaque nuit est donc équivalente). Sachant qu’il est peu probable que les futurs explorateurs puissent un jour passer deux semaines ou plus sans dormir pour tirer le meilleur parti du jour lunaire, ce futur cadre de temps devra également être adapté pour les astronautes.