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Les baleines pourraient-elles redevenir des animaux terrestres ?

Selon une étude récente, les probabilités que les mammifères aquatiques, comme les baleines, évoluent pour vivre à nouveau sur terre sont quasi nulles. Les chercheurs ont en effet découvert que les adaptations ayant permis à ces animaux de vivre dans l’eau ont dépassé un seuil évolutif de non-retour. Les détails de ces travaux sont publiés dans les Actes de la Royal Society B.

Transition eau-terre, et inversement

Il y a environ 350 à 400 millions d’années, des poissons primitifs ont émergé des eaux pour commencer à se déplacer sur la terre ferme. Au cours de cette période évolutive majeure, ces organismes ont développé des adaptations anatomiques, comme des nageoires charnues avec des os et des muscles robustes leur permettant de supporter leur poids hors de l’eau. Le processus de respiration a également subi des modifications, passant d’une respiration branchiale aquatique à une respiration à l’aide de structures pulmonaires adaptées à l’absorption de l’oxygène atmosphérique.

Cette colonisation terrestre a finalement ouvert la voie à une diversification ultérieure des animaux, donnant naissance aux tétrapodes, un groupe de vertébrés qui comprennent les mammifères, les oiseaux, les reptiles et les amphibiens.

Par la suite, alors que la plupart des mammifères sont restés sur terre, certains ont évolué pour retourner dans l’eau. Un exemple remarquable de cette transition est celui des ancêtres des baleines. Il y a environ cinquante millions d’années, des mammifères terrestres primitifs ont en effet commencé à s’adapter à la vie aquatique en développant progressivement des caractéristiques adaptées, telles que des membres transformés en nageoires, un corps fuselé, une peau lisse et des adaptations respiratoires pour la plongée.

Au fil du temps, ces cétacés primitifs ont évolué pour donner naissance à des groupes tels que les basilosauridés et les dorudontinés qui sont considérés comme les ancêtres directs des baleines modernes. Par la suite, ces organismes ont continué à subir des adaptations marquées, notamment la perte progressive des membres arrière ou le développement de nageoires caudales puissantes.

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Crédits : estt/istock

Point de non-retour

Par ailleurs, des chercheurs se sont récemment demandé si ces mammifères aquatiques pourraient ou non se réadapter à la vie terrestre.

L’idée que l’évolution n’est pas réversible fut avancée pour la première fois par le paléontologue belge Louis Dollo au 19e siècle qui formula une loi. Cette loi de Dollo postule que lorsqu’un trait complexe est perdu au cours de l’évolution d’une lignée, il est peu probable qu’il réapparaisse dans les générations futures de cette même lignée.

Pour tester cette idée chez les mammifères, les chercheurs ont étudié plus de 5 600 espèces de mammifères qu’ils ont divisées en quatre catégories : les espèces entièrement terrestres; celles avec quelques adaptations aquatiques, mais qui sont encore mobiles sur terre; celles à locomotion limitée sur terre; et les groupes entièrement aquatiques, comme les baleines.

Le modèle développé par les chercheurs a permis d’examiner les relations évolutives entre les espèces avec des branches indiquant une ascendance commune. En comparant les traits de ces espèces, les chercheurs ont créé des modèles qui estimaient la probabilité d’évolution de traits spécifiques. « L’un des principaux points de notre travail était d’inclure l’ensemble du gradient des adaptations des formes entièrement terrestres aux formes entièrement aquatiques, et de tester si ces adaptations étaient irréversibles« , détaille Bruna Farina de l’Université de Fribourg (Suisse).

Au terme de leurs analyses, les chercheurs ont finalement constaté qu’il était possible de passer d’un environnement entièrement terrestre à semi-aquatique (par petites étapes). Cependant, il existe un seuil irréversible pour certaines adaptations aquatiques. Par conséquent, les probabilités que des animaux entièrement aquatiques, comme les baleines, reviennent à la vie sur la terre ferme sont pratiquement nulles.

Notez que cette étude se concentre uniquement sur les mammifères marins. Il serait donc intéressant d’examiner si les mêmes irréversibilités sont également valables dans d’autres lignées de tétrapodes.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.