Certaines bactéries pourraient-elles réduire le taux de méthane libéré dans notre atmosphère ?

Molécule méthane CH4
Molécule de méthane CH4. Crédits : vchal/istock

Le méthane (CH4) est un gaz qui participe fortement à l’effet de serre, en concurrence avec le dioxyde de carbone (CO2), le principal responsable du réchauffement climatique. Une fois utilisé comme hydrocarbure, le méthane se dégrade partiellement. Cela étant, ce n’est pas suffisant pour éviter un excédent atmosphérique. Des bactéries sont toutefois capables de générer une énergie électrique en absorbant ce gaz polluant.

Depuis l’avènement de l’industrie il y a à peine plus d’un siècle, notre monde souffre d’un relâchement excessif de gaz à effet de serre, déséquilibrant les conditions environnementales qui ont permis le développement de millions d’espèces vivantes durant des millions d’années. Le taux de méthane dans l’atmosphère ne cesse ainsi d’augmenter et a atteint une hausse record en 2021. C’est pourquoi les chercheurs tentent de trouver rapidement des parades à cette épée de Damoclès qui pèse sur notre si précieuse planète Terre.

Dans cet esprit, des scientifiques néerlandais ont étudié des bactéries appelées archées anaérobies méthanotrophes (ANME). Leur spécificité ? Elles permettent de matérialiser un transfert d’électrons extracellulaires lors de l’ingestion et de la transformation du méthane, ce qui en fait des organismes chimioautotrophes. Autrement dit, ces cellules produisent de l’électricité tout en assainissant l’air. L’équipe de chercheurs s’est ici intéressée au processus de conversion du gaz, ainsi qu’à la potentielle utilisation à grande échelle de l’électricité produite par ces fameuses bactéries Candidatus Methanoperedens .

Une pile bioélectrochimique

Sur le principe, les méthanotrophes oxydent le méthane en réduisant un atome d’oxygène en H2O2, puis en altérant le méthane en CH3OH à l’aide de monooxygénases de méthane (MMO). Pour entamer le processus, ces organismes ont d’abord besoin de nitrate pour entamer la décomposition du méthane. C’est pourquoi nous les trouvons dans des milieux humides tels que les tourbières et autres eaux stagnantes.

Tourbière lac
Tourbière et lac Lispach, commune de La Bresse dans les Vosges, France. Crédits : Vosagus/Wikimedia

La microbiologiste Heleen Ouboter explique : « Nous créons une sorte de batterie à deux bornes, dont l’une est une borne biologique et l’autre une borne chimique. Nous cultivons les bactéries sur l’une des électrodes, auxquelles les bactéries cèdent des électrons issus de la conversion du méthane ».

Suivant ce processus, les scientifiques ont pu détecter une densité de courant de 274 milliampères par mètres carrés. Ainsi, ils en ont déduit que 38 % du courant produit par ces bactéries sont en lien direct avec l’apport en méthane. Plus d’un tiers du gaz est transformé en énergie électrique par ces micro-organismes, ce qui a forcément abouti à un questionnement sur une potentielle utilisation à l’échelle humaine.

Un remplacement des centrales existantes ?

« Dans les installations de biogaz actuelles, le méthane est produit par des micro-organismes puis brûlé, ce qui entraîne une turbine, générant ainsi de l’électricité. Moins de la moitié du biogaz est convertie en électricité et c’est la capacité maximale réalisable. Nous voulons évaluer si nous pouvons faire mieux en utilisant des micro-organismes », rapporte la microbiologiste Cornelia Welte.

Usine biogaz
Usine de biogaz. Crédits : abadonian/iStock

Ce générateur nouvelle génération est encore bien loin de pouvoir répondre la forte demande énergétique de l’humanité. Cependant, les scientifiques s’attellent à la tâche afin de développer ce concept pour le rendre plus performant. Rappelons-le, ce procédé réaliserait d’une pierre deux coups en diminuant la quantité de méthane libérée dans l’atmosphère tout en produisant de l’énergie électrique grâce à des cellules vivantes microscopiques. Affaire à suivre.