Ordinateurs quantiques : nouvelle avancée majeure dans le contrôle des qubits

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Crédits : Bartlomiej Wroblewski/istock

Les ordinateurs quantiques ont longtemps été un rêve lointain des chercheurs en informatique, mais aujourd’hui, ils deviennent progressivement une réalité. Ces ordinateurs promettent de résoudre des problèmes complexes que les ordinateurs traditionnels mettraient des milliers d’années à traiter. Pour qu’ils atteignent leur plein potentiel, il est toutefois nécessaire de manipuler avec une précision extrême des petites unités d’information appelées qubits. Or, une équipe de chercheurs a récemment réalisé une avancée spectaculaire en réussissant à contrôler quatre qubits simultanément avec une précision inédite. 

Qu’est-ce qu’un qubit et pourquoi est-il si important ?

Dans les ordinateurs traditionnels, l’information est stockée et traitée sous forme de bits qui peuvent être soit 0, soit 1. Ces ordinateurs fonctionnent donc sur une base binaire. Les ordinateurs quantiques utilisent quant à eux des qubits. Un qubit, en raison des lois de la physique quantique, peut exister dans un état de superposition, c’est-à-dire qu’il peut être simultanément 0 et 1. Cette capacité à être dans plusieurs états en même temps permet aux ordinateurs quantiques d’effectuer des calculs bien plus rapidement que leurs homologues classiques, notamment pour des tâches complexes comme la modélisation des molécules ou la résolution de certains types de problèmes d’optimisation.

Cependant, contrôler ces qubits n’est pas une tâche simple. Ils sont en effet extrêmement sensibles aux perturbations extérieures, ce qui les rend difficiles à manipuler et à maintenir dans un état stable. Cela a constitué l’un des principaux défis pour les chercheurs en informatique quantique : parvenir à contrôler avec précision plusieurs qubits en même temps.

Une avancée majeure dans le contrôle des qubits

C’est dans ce contexte que l’équipe de l’Université de technologie de Delft (TU Delft), aux Pays-Bas, a récemment réalisé un exploit impressionnant. Les chercheurs ont réussi à contrôler un système de quatre qubits en utilisant des points quantiques. Les points quantiques sont de minuscules dispositifs semi-conducteurs dans lesquels les qubits sont confinés. Grâce à des avancées dans les techniques de mesure et de contrôle, l’équipe a démontré qu’il est désormais possible de manipuler ces qubits de manière très précise, ce qui constitue une avancée majeure dans le domaine.

Lieven Vandersypen, l’auteur principal de l’étude, explique qu’au cours de cette nouvelle recherche, l’équipe a d’abord cherché à ajuster les interactions entre les qubits, en particulier les échanges de spins (les mouvements internes des particules subatomiques) dans un réseau de points quantiques. Pour cela, ils ont utilisé des impulsions de tension afin de contrôler les interactions entre les spins de chaque qubit. Cette méthode a permis à l’équipe non seulement de contrôler les qubits individuellement, mais aussi d’effectuer des opérations sur plusieurs qubits simultanément, créant ainsi des portes quantiques qui échangent de l’information entre deux qubits à la fois.

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Illustration d’un ordinateur quantique. Crédits : Bartlomiej Wroblewski/istock

Pourquoi cette découverte est-elle si importante ?

Avant cette découverte, les chercheurs étaient parvenus à contrôler des systèmes quantiques composés de seulement deux qubits. L’équipe de TU Delft est la première à avoir montré qu’il est possible de contrôler un système de quatre qubits avec une précision suffisante pour exécuter des opérations quantiques fiables. Cette avancée est significative, car plus le nombre de qubits augmente, plus le système devient complexe. Le contrôle d’un plus grand nombre de qubits est essentiel pour que les ordinateurs quantiques puissent effectuer des calculs réellement puissants.

Chaque qubit de ce système est constitué de deux spins et leur manipulation s’effectue par des impulsions de tension précises. Ce contrôle sur chaque qubit ouvre la voie à de nouvelles possibilités pour l’échelle des ordinateurs quantiques, permettant des calculs plus grands et plus rapides. Cette nouvelle méthode est prometteuse, car elle permet non seulement de contrôler des qubits isolés, mais aussi de réaliser des interactions complexes entre les qubits dans un réseau.

L’impact futur de cette avancée

La possibilité de contrôler plusieurs qubits à la fois n’est pas simplement un exploit technologique ; elle a de nombreuses applications potentielles dans des domaines variés. Par exemple, les chercheurs en chimie et en biologie pourraient utiliser les ordinateurs quantiques pour simuler des molécules complexes, ce qui pourrait révolutionner le développement de nouveaux médicaments et matériaux. Dans le domaine de l’intelligence artificielle, des algorithmes quantiques plus puissants pourraient être développés pour traiter des données beaucoup plus rapidement et efficacement qu’aujourd’hui.

En outre, cette avancée pourrait permettre de simuler des phénomènes physiques complexes comme le magnétisme ou la physique des matériaux à l’échelle atomique. En modélisant ces phénomènes avec plus de précision, les chercheurs pourraient mieux comprendre des phénomènes naturels fondamentaux, voire développer des technologies nouvelles dans des secteurs comme les batteries de nouvelle génération ou l’optimisation des réseaux énergétiques.

Une route encore semée d’embûches

Même si cette découverte est un pas important, il reste encore beaucoup à faire avant que l’informatique quantique ne devienne une réalité pleinement fonctionnelle et accessible. Par exemple, la fidélité des opérations à deux qubits (celles qui échangent des informations entre deux qubits différents) devra être améliorée et des techniques pour gérer l’erreur quantique devront être développées. L’une des prochaines étapes cruciales serait de démontrer que ces portes quantiques à deux qubits peuvent également être réalisées avec une fidélité supérieure à 99 %, ce qui garantirait des calculs plus fiables et plus durables.