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Les aurores de Jupiter fascinent et intriguent

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Les aurores bleutées de Jupiter sont les plus puissantes jamais enregistrées dans le Système solaire. De nouvelles mesures prises par la sonde Juno révèlent aujourd’hui que ces spectacles de lumière cosmique sont générés par une source d’énergie complètement inattendue.

Juno, en orbite autour de Jupiter depuis un peu plus d’un an, nous envoyait il y a quelques jours des clichés incroyables de Jupiter, la plus imposante et la plus ancienne planète de notre Système. Mais Juno n’est pas sur place que pour faire des photos. La sonde doit en effet collecter des données sur les couches internes de Jupiter, la composition de son atmosphère et les caractéristiques de sa magnétosphère. La structure de cette planète géante gazeuse et son mode de formation restent en effet encore très mystérieux. Pour travailler sur place, Juno est équipé de nombreux instruments tous plus sophistiqués les uns que les autres. Et l’un d’eux aura permis de faire la lumière sur les étranges et sublimes aurores de la planète.

Une aurore polaire sur Jupiter. Crédits : Bertrand Bonfond

Le détecteur de particules énergétiques (JEDI) a en effet enregistré des signatures d’énergie au-dessus du pôle nord du géant du gaz tandis que Juno filait à plus de 160 000 km/h. À cette vitesse, l’appareil n’a eu que quelques secondes pour effectuer ses mesures, mais cela a été suffisant pour déterminer les processus en cours derrière les émissions aurorales de Jupiter. Et il s’avère qu’ils sont très différents de ceux opérés sur Terre.

Sur Terre, les aurores les plus intenses sont produites lorsque des électrons ou des protons sont accélérés par un potentiel électrique relativement stable généré le long des lignes du champ magnétique terrestre. Ces particules chargées fortement accélérées viennent ioniser les molécules de la haute atmosphère, produisant ces magnifiques spectacles lumineux généralement observés au niveau des pôles. Pour les petites aurores de Jupiter, les processus sont assez similaires à ceux observés pour les aurores intenses sur Terre. Mais pour ce qui concerne les aurores les plus intenses observées là-bas, c’est autre chose.

Les résultats publiés dans la revue Nature suggèrent ici que les champs électriques ne s’alignent pas avec ces aurores. Celles-ci ne doivent pas être produites simplement par l’apparition d’un potentiel électrique le long des lignes de champ magnétique. Le champ magnétique très instable de Jupiter pourrait alors engendrer des potentiels électriques turbulents et oscillants à la manière de grandes « vagues ». Or, de telles variations rapides du potentiel électrique génèrent aussitôt une accélération ou une succession d’accélérations sur les électrons pouvant facilement les porter à des énergies élevées et être à l’origine de ces aurores plus intenses.

Ainsi ces résultats déroutent un peu les chercheurs. Ce phénomène est en effet observé sur Terre, mais il est à l’origine des aurores les plus faibles. Les processus en œuvre paraissent donc inversés entre la Terre et Jupiter. Le processus qui produit les aurores les plus faibles sur Terre produit les aurores les plus intenses sur Jupiter et inversement. Lorsque l’on transpose la physique observée ici sur Terre à d’autres corps, on se rend vite compte que l’espace peut être très surprenant et parfois déroutant. « C’est en même temps très excitant, car cela signifie que nous avons encore beaucoup de travail à faire pour comprendre ce qui se passe exactement », a déclaré l’astrophysicien Jonathan Nichols, de l’Université de Leicester au Royaume-Uni, qui n’a pas participé à l’étude alors qu’il était interrogé par The Verge. « Jupiter ne va pas abandonner ses secrets aussi facilement, semble-t-il ».

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