Un atterrisseur sur VĂ©nus pourrait-il survivre plus de quelques heures ?

VĂ©nus
Les premières images couleur prises de la surface de Vénus par la sonde spatiale Venera-13. Crédit : NASA

VĂ©nus et la Terre sont parfois qualifiĂ©es de jumelles. Et pour cause, les deux planètes sont rocheuses et ont des tailles et des masses Ă  peu près similaires. VĂ©nus est Ă©galement la planète la plus proche de nous, Ă  environ 40 millions de kilomètres au plus près. Une question se pose alors : pourquoi ces deux mondes ont-ils empruntĂ© des chemins aussi diffĂ©rents ? Que s’est-il passĂ© dans l’histoire de VĂ©nus pour qu’elle devienne invivable Ă  ce point ? Cette incroyable divergence est difficile Ă  saisir. C’est pourquoi il est important d’Ă©tudier VĂ©nus de près. Cependant, cette planète ne rend pas les choses faciles.

Vénus, un véritable enfer

L’endroit le plus inhospitalier du système solaire est probablement VĂ©nus. La planète possède une tempĂ©rature de surface suffisamment chaude pour faire fondre le plomb (près de 460°C) et une pression suffisamment Ă©levĂ©e pour Ă©craser la coque d’un sous-marin nuclĂ©aire. Les SoviĂ©tiques ont tentĂ© tant bien que mal d’explorer cet environnement extrĂŞme entre la fin des annĂ©es 1960 et le dĂ©but des annĂ©es 1980. Sur leurs quatorze tentatives d’atterrissage, seulement neuf ont rĂ©ussi, mais aucun de ces engins n’a tenu plus de 127 minutes avant que les systèmes Ă©lectriques ne succombent.

Il y a quelques annĂ©es, une idĂ©e de mission amĂ©ricaine proposait un système de refroidissement par gaz liquide. Cependant, cette approche ne permettait d’assurer la survie d’un atterrisseur que moins d’un jour. Dans ces conditions, des Ă©chantillons de plusieurs unitĂ©s gĂ©ologiques et des donnĂ©es mĂ©tĂ©orologiques critiques, importantes pour tenter de rĂ©pondre aux questions des chercheurs, auraient Ă©tĂ© impossibles Ă  obtenir.

Dès 2016, la NASA s’Ă©tait Ă©galement penchĂ©e sur une autre approche : l’Automaton Rover for Extreme Environments (AREE), un concept de machine ultra rĂ©sistante et entièrement mĂ©canique, capable d’explorer et d’étudier diffĂ©rentes unitĂ©s gĂ©ologiques Ă  la surface de VĂ©nus. Finalement, un tel rover, bien que faisable, s’est avĂ©rĂ© peu pratique durant les phases de test.

La meilleure option pourrait ĂŞtre un rover hybride qui combine des qualitĂ©s mĂ©caniques et Ă©lectroniques. Nous savons que la NASA travaille sur un projet de ce type : le Long -Lived In situ Solar System Explorer (LLISSE). Cet instrument pourrait intĂ©grer la mission russe Venera-D qui prĂ©voit l’envoi d’un orbiteur et un atterrisseur sur place en 2029.

LLISSE utiliserait de nouveaux matĂ©riaux et une Ă©lectronique rĂ©sistante Ă  la chaleur qui seraient capables de fonctionnement indĂ©pendant pendant environ 90 jours terrestres. Une telle endurance pourrait lui permettre d’obtenir des mesures pĂ©riodiques des donnĂ©es critiques.

LLISSE vénus
Illustration de l’explorateur du système solaire in situ Ă  longue durĂ©e de vie (LLISSE) sur VĂ©nus par rapport aux atterrisseurs traditionnels plus grands. CrĂ©dits : John Wrbanek, NASA GRC.

Des batteries ultrarésistantes

Cette unitĂ© LLISSE pourrait ĂŞtre alimentĂ©e par batteries pour soutenir l’Ă©lectronique. Des panneaux solaires ne seraient en effet pas viables compte tenu des pressions de surface Ă©levĂ©es et des faibles niveaux de lumière (le soleil n’est pas visible sur VĂ©nus, l’atmosphère Ă©tant trop Ă©paisse). Par ailleurs, un gĂ©nĂ©rateur thermoĂ©lectrique Ă  radio-isotopes (RTG), qui Ă©quipe notamment les rovers Perseverance et Curiosity sur Mars, impliquerait une source de chaleur supplĂ©mentaire. VĂ©nus Ă©tant dĂ©jĂ  une fournaise, il n’est pas nĂ©cessaire d’en rajouter.

La NASA aurait d’ailleurs fait un grand pas en avant dans le dĂ©veloppement de ces batteries. L’agence travaille en effet depuis quelques annĂ©es avec une sociĂ©tĂ© appelĂ©e Advanced Thermal Batteries, Inc. (ATB). Ensemble, les ingĂ©nieurs auraient crĂ©Ă© un premier modèle capable de fonctionner aux tempĂ©ratures de VĂ©nus pendant une journĂ©e solaire entière de VĂ©nus, soit environ 120 jours terrestres. La batterie, qui contiendrait dix-sept cellules individuelles, utiliserait une chimie et des matĂ©riaux de structure spĂ©cialement conçus.

Notez que ces batteries sont encore en dĂ©veloppement. Par ailleurs, on ignore encore si une telle charge pourrait ou non intĂ©grer une mission russe compte tenu des tensions gĂ©opolitiques actuelles. Nous savons Ă©galement que la NASA travaille sur deux missions nommĂ©es DAVINCI et VERITAS dont les lancements sont prĂ©vus Ă  la fin de la dĂ©cennie. Cependant, leur architecture ne semble pas permettre l’intĂ©gration d’un atterrisseur. Affaire Ă  suivre donc.