L’astéroïde Bennu continue de fasciner les scientifiques du monde entier. Après des années d’attente et de recherches intensives, les résultats des analyses des échantillons collectés par la mission OSIRIS-REx viennent d’être publiés, et ils sont tout simplement stupéfiants. Ce petit corps céleste apparemment anodin s’est avéré détenir des secrets qui pourraient répondre à l’une des questions les plus fondamentales de l’humanité : comment la vie est-elle apparue sur Terre ? En effet, les analyses ont révélé que l’astéroïde contient les cinq nucléobases qui composent l’ADN et l’ARN. Cette découverte remet en question nos idées sur l’origine de la vie et alimente davantage le débat sur la théorie de la panspermie.
Une mission spatiale hors du commun
L’aventure de la sonde OSIRIS-REx commence en 2016, lorsqu’elle est lancée par la NASA avec pour mission d’explorer l’astéroïde Bennu. Il s’agit d’un objet de grande valeur pour les chercheurs, car il est riche en carbone et pourrait abriter des molécules organiques primitives qui ont existé il y a des milliards d’années. Situé à 320 millions de kilomètres de la Terre, Bennu représente une capsule temporelle préservée des influences extérieures depuis la formation du Système solaire, il y a 4,6 milliards d’années.
Arrivée en 2018, la sonde commence par scruter sa surface pour en apprendre davantage sur sa composition, sa rotation et son environnement. Au cours de ses deux années d’étude, OSIRIS-REx identifie plusieurs points d’intérêt avant de se lancer dans la collecte d’un échantillon en 2020. Après un contact réussi avec la surface de l’astéroïde, un échantillon de 121,6 grammes est récupéré et conservé dans des conditions strictes afin d’éviter toute contamination avant son retour sur Terre en octobre 2023. Ce moment marque un tournant pour la science spatiale : pour la première fois, des matériaux provenant d’un astéroïde sont directement analysés en laboratoire.
Des découvertes qui redéfinissent la chimie de la vie
L’analyse des échantillons de Bennu a révélé une richesse de composés organiques essentiels à la vie telle que nous la connaissons. Parmi ces molécules, on trouve les cinq nucléobases : adénine, guanine, cytosine, thymine et uracile. Or, ce sont les éléments constitutifs de l’ADN et de l’ARN, les molécules fondamentales de la transmission génétique dans tous les organismes vivants. Cette découverte est d’une importance capitale, car elle montre que les éléments clés du code génétique de la vie existent depuis des milliards d’années, bien avant que la Terre ne devienne habitable.
En plus de ces nucléobases, les scientifiques ont identifié d’autres composés chimiques présents sur l’astéroïde, tels que des minéraux riches en carbone, en phosphore, en soufre, en fluor et en sodium. Ces éléments jouent des rôles cruciaux dans la chimie biologique. Parmi les composés détectés, on trouve également du carbonate de sodium, un minéral qui existe sur Terre dans les lacs asséchés et qui est lié à la formation de molécules organiques complexes, telles que les acides aminés et les protéines.
Ces résultats, qui font l’objet de deux articles publiés dans Nature Astronomy, ont une portée considérable. En plus de confirmer que les éléments fondamentaux à la vie étaient déjà présents dans le Système solaire primitif, ils suggèrent que les conditions nécessaires à la formation de la vie ont pu exister ailleurs, dans d’autres parties de l’Univers.

L’hypothèse de la panspermie : un pas de plus vers la preuve ?
La découverte de ces molécules sur Bennu renforce l’hypothèse de la panspermie, une théorie qui postule que la vie (ou du moins ses éléments essentiels) pourrait avoir été transportée sur Terre par des astéroïdes ou des comètes. Selon cette hypothèse, la Terre n’aurait pas été le berceau exclusif de la vie, mais un lieu de rencontre pour des molécules organiques qui auraient été semées dans l’espace interplanétaire.
Si l’idée de la panspermie n’est pas nouvelle, l’échantillon de Bennu constitue un élément de preuve significatif. En effet, jamais auparavant un astéroïde n’avait livré un échantillon qui contient ces molécules biologiques complexes et encore moins l’ensemble des cinq nucléobases essentielles à la constitution de l’ADN et de l’ARN. Cette découverte pourrait ainsi marquer un tournant dans notre compréhension des origines de la vie et soutenir l’idée que la vie sur Terre pourrait ne pas être un phénomène isolé, mais un processus interplanétaire.
De nouvelles perspectives pour l’exploration spatiale
Les implications de cette découverte ne se limitent pas à l’origine de la vie sur Terre. Elle ouvre également de nouvelles perspectives pour la recherche de la vie ailleurs dans le Système solaire. Des corps célestes comme Cérès, la plus grande planète naine de la ceinture d’astéroïdes, ou Encelade, une lune glacée de Saturne, pourraient abriter des conditions propices à la formation de molécules organiques complexes similaires à celles découvertes sur Bennu.
Les scientifiques envisagent également de nouvelles missions spatiales pour explorer ces corps et, à terme, y chercher des signes de vie. Les résultats d’OSIRIS-REx viennent ainsi confirmer l’importance des missions d’exploration des astéroïdes, car elles permettent d’étudier des matériaux qui n’ont pas été modifiés par des forces internes comme le volcanisme ou l’érosion, ce qui offre ainsi un aperçu direct des conditions dans lesquelles les premières formes de vie auraient pu apparaître.