Une simulation réalisée par des scientifiques du centre de recherche de l’Université de Tohoku révèle une tendance inquiétante pour la diversité des noms de famille au Japon. Selon les résultats, si la loi actuelle sur le mariage qui oblige les couples à choisir un seul nom de famille reste inchangée, tous les Japonais pourraient porter le nom de famille « Sato » d’ici l’an 2531.
Un pays rempli de « Sato »
Au Japon, les couples doivent choisir un seul nom de famille, et ce, même si le gouvernement a autorisé l’apparition des noms de jeune fille aux côtés des noms de mariage sur les passeports, les permis de conduire et les certificats de résidence. Ce pays reste d’ailleurs le seul au monde à exiger que les conjoints utilisent le même nom.
De nos jours, 96 % des couples choisissent le nom de l’homme. En 2023, le nom de famille « Sato » était alors le plus répandu au Japon, partagé par 1,529 % de la population, suivi de près par Suzuki. Bien que ce pourcentage puisse sembler faible, il a progressé de manière significative entre 2022 et 2023, avec une augmentation de 1,0083 fois.
Selon une équipe dirigée par Hiroshi Yoshida, professeur d’économie à l’université de Tohoku, en supposant que cette croissance se poursuive, tous les Japonais pourraient alors potentiellement porter le nom de famille « Sato » d’ici cinq siècles.
Cette tendance résulte également en partie du fait que de nombreux individus se marient dans des familles portant des noms de famille courants, contribuant ainsi à l’absorption progressive des noms moins communs par des familles plus nombreuses.
« Si tout le monde devient Sato, nous devrons peut-être être appelés par nos prénoms ou par des numéros« , note Hiroshi Yoshida. « Je ne pense pas que ce serait un monde dans lequel il ferait bon vivre ». Selon lui, une nation de Satos porterait atteinte à la dignité individuelle et conduirait également à la perte du patrimoine familial et régional.
Une proposition de loi
Cependant, une modification de la loi sur le mariage pourrait changer la donne. Si le Japon permettait aux couples mariés d’avoir des noms de famille distincts, et en supposant qu’environ 60% des Japonais profitent de cette mesure (la proportion de personnes ayant déclaré qu’elles le feraient dans une enquête de 2022), le pourcentage de personnes portant le nom de famille « Sato » chuterait alors considérablement, passant à seulement 7,96 % d’ici cinq siècles.
Il est important de noter que cette étude a été réalisée dans le cadre du Think Name Project qui milite pour la modification de la loi sur le mariage pour permettre des noms de famille distincts. Cette étude, bien que spéculative, souligne néanmoins les implications sociales et culturelles d’une uniformité potentielle des noms de famille au Japon.
Les membres conservateurs du parti libéral-démocrate (LDP), actuellement au pouvoir, affirment de leur côté que modifier la loi « porterait atteinte » à l’unité familiale et sèmerait la confusion parmi les enfants.
Une menace pour la diversité culturelle et linguistique
La réduction drastique de la diversité des noms de famille au Japon ne se limite pas à une simple question administrative : elle représente également un risque pour la richesse culturelle et linguistique du pays. Chaque nom de famille porte une histoire unique, souvent liée à une région, une profession ou une lignée ancestrale spécifique. L’uniformisation des patronymes, comme le souligne Hiroshi Yoshida, pourrait entraîner la disparition de ce patrimoine immatériel, appauvrissant ainsi l’identité collective du pays. Ce phénomène soulève des questions cruciales sur la manière dont les traditions et les valeurs sociales doivent être préservées face aux contraintes législatives et démographiques.