Arctique : une étude révèle les origines de l’étonnante polynie d’août 2018

Crédits : EOSDIS Worldview.

En août 2018, un trou d’une dimension exceptionnelle s’est ouvert dans la banquise qui couvre habituellement les eaux situées au nord du Groenland. De récents travaux font la lumière sur l’origine de cet évènement pour le moins atypique. 

Qu’est-ce qu’une polynie ?

Une polynie désigne une zone partiellement ou totalement dépourvue de glace située au milieu de la banquise. Le terme provient à cet égard du russe signifiant littéralement trou dans la glace. Ces ouvertures dans un océan autrement pris par le gel se forment naturellement au gré des saisons et des conditions météorologiques locales.

En février 2018, une polynie d’une dimension exceptionnelle s’est formée en mer de Wandel, au nord-est du Groenland. En effet, jamais une ouverture aussi prononcée n’avait été observée dans cette région depuis le début des observations satellitaires. Son apparition a été liée à un important épisode de vent de sud qui a provoqué une dispersion et une dérive de la glace de mer loin des côtes groenlandaises.

Six mois plus tard, en août 2018, une autre polynie s’est développée en mer de Lincoln avant de s’étendre sur toute la côte nord du Groenland, là où se trouve habituellement une banquise épaisse et pérenne. Cette ouverture tout aussi exceptionnelle n’avait jusqu’à présent pas fait l’objet d’une étude dédiée. Aussi, une équipe de chercheurs s’est récemment attelée à la tâche. Les résultats ont été publiés dans la revue Advances in Atmospheric Sciences en juin dernier.

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Concentration en glace de mer au nord du Groenland entre le 29 juillet (a), 5 août (b), 13 août (c) et 5 septembre (d) 2018. Notez l’apparition, l’extension, puis la disparition de la polynie (tracée en noir). Crédits : Chang-Qing Ke & al. 2021.

Une glace de plus en plus sensible aux effets du vent

« Nous avons constaté que la couverture de glace de mer qui était alors la plus mince en août depuis 1978 et le vent modéré de sud étaient responsables de la formation et du maintien de cette polynie » explique Chang-Qing Ke, auteur principal du papier. « La dérive de la glace de mer est devenue plus sensible au forçage atmosphérique en raison de l’amincissement de la banquise avec le changement climatique ».

Autrement dit, le vent disperse et fait plus facilement dériver la glace, ce qui augmente la probabilité de voir des brèches s’ouvrir. Les chercheurs parlent de contribution dynamique – c’est-à-dire liée au mouvement. Un autre facteur qui entre en jeu est la remontée d’eau chaude et salée par le dessous lorsque le vent souffle à la surface de l’océan. On parle à cet égard de contribution thermodynamique.

Cependant, le manque d’observations in situ limite la capacité à évaluer la contribution précise de cette dernière. De fait, les chercheurs ont surtout eu recours aux données satellitaires, à un modèle climatique et à un produit de réanalyse. De futurs travaux seront par conséquent nécessaires pour préciser la contribution thermodynamique à la formation des polynies arctiques.