Avec 60 à 70 % des parts de marché mondial, le café arabica, prisé pour sa saveur douce, se place loin devant la variété robusta, plus forte et amère, dans le cœur des amateurs d’expresso matinal. Toutefois, ce breuvage très apprécié et bon pour la santé en consommation légère à modérée n’a semble-t-il pas encore révélé tous ses secrets. Dans le cadre d’une étude publiée le 15 avril dans la revue Nature Genetics, des chercheurs ont retracé l’histoire complexe de l’arabica et ont fait des révélations surprenantes sur ses origines en séquençant le génome de plants de café.
Les racines anciennes du café
Les scientifiques ont pu retracer les origines du café jusqu’à l’Éthiopie. Toutefois, il aura fallu attendre les années 1400 pour que les premiers grains soient torréfiés et préparés au Yémen. La légende veut ensuite que Baba Budan, un pèlerin indien célèbre pour avoir introduit le café en Inde au 17e siècle, ait secrètement transporté sept grains de café du Yémen en Inde avant de les planter dans les montagnes de Chikmagalur, Karnataka. Ces graines donnèrent alors naissance aux premiers plants de café indien, permettant à cet homme de s’imposer comme un pionnier dans l’histoire de la culture du café dans son pays et de lancer une tradition qui s’est depuis répandue dans le monde entier.
Cela permit ainsi d’intensifier la diversification de la culture du café. Toutefois, cette nouvelle étude montre que le café n’a pas attendu d’être cultivé par l’homme pour créer lui-même de nouvelles variétés.
L’histoire de l’arabica retracée par la science
Afin de retracer l’arbre généalogique mondial de l’arabica, le type de café le plus populaire que les scientifiques désignent sous son nom latin Coffea arabica, cette étude a nécessité le séquençage de 41 variétés sauvages ou cultivées venues du monde entier (dont une espèce ancienne des années 1700 empruntée au Musée d’Histoire naturelle de Londres) afin d’identifier et analyser chacune des briques qui composent leur ADN et d’obtenir le génome (ou code génétique) le plus complet jamais mis au point de l’arabica. À partir de cela, les chercheurs ont pu remonter à ses origines et déterminer très précisément son histoire génétique.
Cela a notamment permis de découvrir que ces espèces ont émergé il y a environ 600 000 ans suite au croisement entre Coffea canephora et Coffea eugenioides, donnant finalement une hybridation naturelle entre ces deux espèces de caféiers, « autrement dit, avant toute intervention humaine », précise Victor Albert, un biologiste de l’Université d’État de New York à Buffalo (États-Unis) et co-auteur de l’étude.
En étudiant l’histoire de l’évolution du café, cette étude a révélé une évolution mouvementée marquée par des sécheresses qui ont menacé sa survie ou au contraire par des périodes plus humides et chaudes qui lui ont permis de prospérer. Cette analyse génétique très exhaustive a aussi finalement surtout permis de démontrer que les variétés modernes que nous cultivons actuellement sont le résultat d’une hybridation naturelle ancienne et sont donc toutes liées génétiquement.

À quoi cette étude sur les origines du café peut-elle bien servir ?
La culture du café à l’échelle mondiale doit faire face à de nombreuses menaces en plus du déclin des populations de pollinisateurs qui constitue déjà un désavantage pour les producteurs. Étudier génétiquement le café arabica peut notamment permettre d’identifier des variétés plus résilientes, notamment face aux maladies.
Par exemple, la rouille du caféier (une maladie fongique causée par des champignons basidiomycètes, Hemileia vastatrix et Hemileia coffeicola, et présente dans toutes les régions caféicoles du monde) représente un danger de taille pour la production mondiale qui accuse des milliards d’euros de perte chaque année à cause d’elle. En découvrant clairement les sections utiles dans le code génétique des rares plants qui arrivent à mieux résister à la maladie, cela pourrait aider ensuite à protéger la plante et offrir ainsi un avenir plus serein à l’arabica, une espèce déjà particulièrement vulnérable à cause de sa faible diversité génétique.