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Antarctique : des images sans précédent acquises sous le glacier de l’apocalypse

Crédits : capture vidéo / Icefin.

Des observations de terrain effectuées par un petit robot sous-marin permettent de mieux comprendre comment les eaux chaudes qui s’infiltrent sous la base du glacier Thwaites le déstabilisent et pourraient mener à son effondrement. Les résultats ont été publiés à travers deux études parues le 15 février dernier dans la revue Nature (1) et Nature (2).

Le Thwaites est le glacier austral qui participe le plus au relèvement du niveau des océans. Situé en Antarctique de l’Ouest, il a contribué à lui seul pour près de deux millimètres à l’augmentation observée depuis 1974. Il n’est donc pas étonnant de constater que les chercheurs l’étudient avec une attention toute particulière. À cet égard, le Thwaites est aussi connu comme étant le glacier de l’apocalypse, un terme qui se veut toutefois plus médiatique que scientifique.

Récemment, des chercheurs du Royaume-Uni et des États-Unis ont utilisé un robot sous-marin afin de visualiser de façon directe le dessous du glacier, et plus précisément la partie qui flotte sur la mer. Cette zone très mal observée est pourtant cruciale car des eaux plus chaudes viennent faire fondre la glace par le dessous, ce qui fait reculer la ligne de mise à terre du glacier. Or, comme ce dernier repose sur un socle rocheux en pente, l’eau s’infiltre toujours plus profondément sous la plate-forme ce qui déstabilise encore un peu plus le glacier.

glacier Thwaites
Représentation schématique de la configuration du glacier Thwaites. La ligne de mise à terre est indiquée par un point orange et l’infiltration d’eaux relativement chaudes par une flèche rouge. Crédits : geobronnen.com.

À terme, ce processus pourrait mener à l’effondrement total du glacier, contribuant à hauteur de 65 centimètres au relèvement moyen du niveau des mers. On rappelle que depuis les années 1990, la ligne de mise à terre du colosse a déjà reculé de 14 kilomètres et son écoulement vers la mer, quasiment doublé. Or, les observations faites par le robot sous-marin montrent que les processus à la base du glacier sont encore plus complexes qu’on ne le pensait déjà.

Sous le glacier, une situation plus complexe que prévue

Comme on peut le voir dans la vidéo ci-dessous, la base du glacier est très plate. Dans cette zone, la fonte est moins rapide que prévue car une couche d’eau froide sépare la glace des eaux plus chaudes qui circulent sous le Thwaites. Cependant, dans certaines zones, l’interface est accidentée avec des terrasses, des fissures et des cavités qui permettent aux eaux plus chaudes de s’infiltrer et de décupler la fonte. Cette dernière est donc plus hétérogène qu’on ne le pensait.

Le robot à l’origine de ces images a été introduit depuis la surface de la plateforme via un trou de forage de 600 mètres de long. Les observations ont donc été faites à plusieurs centaines de mètres sous la surface de la mer « Ces nouvelles méthodes d’observation nous permettent de comprendre que ce n’est pas seulement l’ampleur de la fonte, mais aussi la manière dont elle se produit et l’endroit où elle se produit qui importent dans ces régions très douces de l’Antarctique », relate Britney Schmidt, auteure principale d’une des études. « L’eau chaude pénètre dans les parties les plus faibles du glacier et aggrave la situation. C’est le genre de chose qui devrait tous nous préoccuper ».

Damien Altendorf

Rédigé par Damien Altendorf

Habitant du Nord-est de la France, je suis avant tout un grand passionné de météorologie et de climatologie. Initialement rédacteur pour le site "Monsieur Météo", je contribue désormais à alimenter celui de "Sciencepost".