Que nous disent les anneaux de Saturne sur le noyau de la planète ?

Crédits : NASA/JPL-Caltech/Space Science Institute

En s’appuyant sur les données de la sonde Cassini, des astrophysiciens ont récemment précisé la taille du noyau de Saturne en examinant son influence sur le grand anneau C de la planète. L’équipe a déterminé que ce noyau composé d’une combinaison de glace, de roche, d’hydrogène et d’hélium était environ cinquante fois plus massif que la Terre, ce qui le rend beaucoup plus diffus qu’on ne le pensait auparavant.

Saturne en chef d’orchestre

Les viscères géologiques de notre planète, de la Lune et plus récemment de Mars ont été analysés grâce à des sismomètres. Ces instruments enregistrent la trajectoire des ondes sismiques se déplaçant à travers les différentes couches de l’objet étudié, se comportant différemment en fonction de la matière traversée. En étudiant ces comportements, les chercheurs peuvent alors estimer leur composition interne. Dépourvue de surface solide, Saturne rend cet examen impossible.

D’un autre côté, les sondes en orbite peuvent cartographier approximativement la structure en couches d’une planète gazeuse en détectant de subtils changements de gravité. Toutefois, le noyau de Saturne a un effet si faible sur le champ gravitationnel de la planète que la technique ne peut être utilisée pour le visualiser avec précision. Cela nous ramène à l’anneau C de la planète.

Au cours de ces trois dernières décennies, les chercheurs ont observé d’étranges ondes en spirales à l’intérieur de cet anneau grâce aux missions Voyager et Cassini. Ils ont ainsi appris que ces spirales sont causées par des oscillations en cours au cœur même de la planète. Ces oscillations provoquent des changements dans le champ de gravité local qui attire les particules de glace contenues dans l’anneau C de Saturne et les « fait danser ».

« En d’autres termes, Saturne est un orchestre« , souligne Robin George Andrews, du New York Times. « Différentes notes apparaissent sur l’anneau C comme celles des partitions. Les scientifiques peuvent lire ces notes, entendre la musique et identifier les instruments et les musiciens qui se produisent, le tout sans jamais voir l’orchestre lui-même« .

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Crédits : NASA/ESA, A. Simon/GSFC/MH Wong/Université de Californie à Berkeley/Équipe OPAL

Un noyau incroyablement diffus

En s’appuyant sur les données de la sonde Cassini qui a exploré le système de Saturne de 2004 à 2017, des chercheurs du California Institute of Technology ont ainsi « écouté » les différentes notes produites à l’intérieur de l’anneau C au fil du temps. Ces analyses ont permis de « remonter » jusqu’à l’orchestre et de déterminer la structure du noyau de la planète.

Ces travaux, publiés dans Nature Astronomy, ont révélé un noyau colossal. Environ 55 fois plus massif que la Terre, il représente 60 % du rayon de la planète.

En outre, nous pensions jusqu’à présent que l’intérieur de Saturne présentait une division nette entre un noyau compact de roches et de glace et une enveloppe composée principalement d’hydrogène et d’hélium. Or, ces analyses révèlent que ce noyau est en réalité beaucoup plus diffus. Les roches et la glace cèdent en effet lentement la place aux parties les plus gazeuses de la planète à mesure que l’on s’éloigne du noyau qui, de fait, ne propose aucune frontière clairement définie.

Pour Christopher Mankovich, principal auteur de l’étude, ces nouvelles découvertes sur Saturne ajoutent du crédit à l’idée que l’évolution des géantes gazeuses est un processus graduel entamé par la construction d’un noyau à partir de la coagulation de morceaux de roche spatiale autour duquel vient s’enrouler du gaz pour former le reste de la planète.