Cet « anneau d’Einstein » devient l’objet à lentille gravitationnelle le plus éloigné jamais vu

anneau d'Einstein James Webb Telescope
Crédits : P. van Dokkum et al., Nature Astronomy, 2023

Des photos prises par le télescope spatial James Webb ont révélé l’exemple le plus éloigné jamais capturé d’un « anneau d’Einstein ». Ce halo de lumière déformée serait situé à 21 milliards d’années-lumière de la Terre, mais comment est-ce possible ?

Qu’est-ce qu’un anneau d’Einstein ?

Selon la relativité générale, la présence de masse et d’énergie courbe le tissu de l’espace-temps. La lumière d’une source lointaine se retrouvera ainsi déformée par la présence d’un objet massif situé entre la source lumineuse et l’observateur, puisque cette courbure de l’espace-temps dévie la lumière de sa trajectoire initiale.

De notre point de vue, la lumière de l’objet lointain peut nous apparaître étirée, amplifiée, voire multipliée. On parle alors de lentille gravitationnelle. De cette manière, les chercheurs peuvent observer et analyser des objets lointains qui, autrement, nous seraient invisibles.

La plupart des objets à lentille gravitationnelle forment des arcs ou des anneaux partiels qui entourent l’objet au premier plan. Cependant, si l’alignement entre la source lumineuse, la masse massive et l’observateur est correct, la lumière déviée peut également se courber suffisamment pour former un anneau lumineux autour de la masse massive. Vous obtenez alors un anneau d’Einstein.

Il s’agit d’un phénomène assez rare, d’où l’importance de cette nouvelle étude acceptée pour publication dans la revue Nature Astronomy.

anneaux d'einstein
Une collection d’anneaux d’Einstein photographiés par Hubble. Crédits : NASA

L’anneau le plus éloigné jamais vu

Une équipe de chercheurs annonce en effet avoir identifié un nouvel anneau d’Einstein grâce aux James Webb Telescope dans le cadre de l’enquête COSMOS-Web. Il s’agit d’une carte détaillée de plus de 500 000 galaxies capturées au cours d’une observation continue de 200 heures de l’observatoire.

Nommé JWST-ER1, cet anneau d’Einstein comprend deux parties. La première, nommée JWST-ER1g, représente la galaxie massive intermédiaire qui permet de courber l’espace-temps. La seconde, nommée JWST-ER1r, représente la lumière d’une galaxie plus lointaine qui forme l’anneau lumineux. La galaxie intermédiaire est située à environ 17 milliards d’années-lumière de la Terre, tandis que l’objet d’arrière-plan est 4 milliards d’années-lumière plus loin encore. Il s’agit d’un record.

Cependant, une question se pose : si l’âge de l’univers lui-même n’est que de 13,8 milliards d’années, comment se fait-il que ces objets soient aussi éloignés ?

Expansion de l’univers

Cela peut sembler paradoxal à première vue, mais cette observation est parfaitement cohérente avec les principes de la cosmologie et de la relativité générale. Nous devons ces distances records à l’expansion de l’univers.

Plus concrètement, l’âge de l’univers représente le temps écoulé depuis le Big Bang, le point de départ de l’expansion de l’univers. Cependant, pendant tout ce temps, l’univers a continué à s’étendre. Cela signifie que les objets cosmiques qui étaient initialement plus proches les uns des autres se sont éloignés les uns des autres au fil du temps en raison de l’expansion.

Ainsi, lorsque nous observons des objets cosmiques à des distances très éloignées, nous regardons en réalité vers le passé, car la lumière qui a quitté ces objets il y a longtemps a mis du temps à parcourir l’immensité de l’univers en expansion avant d’atteindre nos télescopes sur Terre. Cela signifie que la distance actuelle entre ces objets et nous est beaucoup plus grande que ce qu’elle était au moment où la lumière a été émise.

Dans le cadre de ces travaux, les chercheurs ont également été en mesure de calculer la masse de la galaxie lentille en voyant à quel point elle avait déformé l’espace-temps autour d’elle. Selon eux, cet objet aurait une masse équivalente à celle d’environ 650 milliards de soleils, ce qui la rend inhabituellement dense pour sa taille. Une partie de cette masse supplémentaire pourrait s’expliquer par une quantité de matière noire plus importante que prévu.