américains mammouths
Les Amérindiens, illustrés ici lors d'une chasse au mammouth, ont développé leurs diverses langues à partir de 4 vagues de population différentes venues de Sibérie, suggère une nouvelle étude. Crédits : Dorling Kindersley ltd

Les peuples autochtones ont colonisé l’Amérique du Nord plusieurs fois

Une étude récente apporte de nouvelles révélations sur la manière dont l’Amérique du Nord a été colonisée par les premiers peuples autochtones. Cette recherche, menée par Johanna Nichols, linguiste historique à l’Université de Californie à Berkeley, se penche sur les preuves linguistiques et archéologiques pour reconstituer le puzzle de l’histoire ancienne du continent.

L’appui de la linguistique

L’histoire de la colonisation humaine de l’Amérique du Nord est l’un des récits les plus intrigants de notre passé. Pendant des décennies, les archéologues et les généticiens ont cherché à retracer les premières migrations des peuples autochtones vers ce continent vaste et diversifié. Cependant, malgré les progrès réalisés, de nombreuses questions demeurent sans réponse. De récents travaux nous permettent d’y voir un peu plus clair.

Ce qui rend cette étude intéressante, c’est sa capacité à associer des données linguistiques à des découvertes archéologiques, climatologiques et génétiques. Dans le détail, les chercheurs ont analysé minutieusement les caractéristiques structurelles de langues autochtones d’Amérique du Nord et étudié des éléments tels que la structure des syllabes, le genre des noms et la phonétique. En parallèle, ils ont examiné des preuves archéologiques pour retracer les mouvements de population, et identifier les sites de peuplement anciens et les artefacts associés.

De plus, les chercheurs ont étudié les données climatiques pour comprendre les conditions environnementales qui ont pu influencer les migrations humaines, notamment les périodes de déglaciation où des ouvertures géographiques rendaient possible la migration des populations.

Enfin, ils ont utilisé des données génétiques pour étudier les liens de parenté entre les populations autochtones et les populations de l’Asie du Nord-Est, fournissant ainsi des informations sur les origines des premiers habitants de l’Amérique du Nord.

En combinant ces différentes sources, les chercheurs ont ainsi pu reconstruire de manière cohérente et détaillée l’histoire complexe de la colonisation de l’Amérique du Nord.

amérique du nord
Le point d’entrée possible des premiers autochtones à des époques où le niveau de la mer était plus bas. Crédits : PeterHermesFurian/iStock

Quatre vagues d’entrées

L’une des découvertes clés de l’étude est l’identification de quatre périodes distinctes d’entrées humaines dans la région qui s’étalent sur une période de plusieurs milliers d’années. Ces entrées se seraient produites à des moments où des ouvertures géographiques rendaient possible la migration des populations, notamment pendant des périodes de déglaciation.

Le modèle proposé par l’étude suggère que les premiers arrivants ont établi des colonies dans des zones riches en ressources, non loin des points d’entrée, et ont progressivement étendu leur présence à travers le continent. Ces colonies ont prospéré et se sont adaptées à leur environnement, contribuant ainsi à façonner la diversité culturelle et linguistique de l’Amérique du Nord.

L’étude remet également en question les théories précédentes sur le moment de l’arrivée des premiers peuples en Amérique du Nord. Pendant des décennies, la communauté scientifique avait en effet généralement accepté l’hypothèse selon laquelle les premiers humains étaient arrivés sur le continent il y a environ 13 000 ans en traversant un pont terrestre qui reliait l’Asie à l’Amérique du Nord. Cependant, en étudiant les caractéristiques linguistiques des langues autochtones, les chercheurs ont identifié des schémas et des structures qui suggèrent une histoire migratoire beaucoup plus ancienne que ce qui était généralement admis. Les résultats de cette nouvelle recherche suggèrent en effet que ces arrivées pourraient remonter à plus de 35 000 ans.

Cette remise en question des théories établies démontre l’importance de la recherche interdisciplinaire et de la remise en question constante des connaissances existantes. En intégrant des données provenant de différentes disciplines, les chercheurs peuvent en effet obtenir une image plus complète et nuancée du passé. Cela ouvre ainsi la voie à de nouvelles perspectives et à de nouvelles découvertes dans le domaine de l’archéologie, de la linguistique et de la génétique.

Les détails de l’étude figurent dans l’American Journal of Biological Anthropology.

Brice Louvet

Rédigé par Brice Louvet

Brice est un journaliste passionné de sciences. Ses domaines favoris : l'espace et la paléontologie. Il collabore avec Sciencepost depuis près d'une décennie, partageant avec vous les nouvelles découvertes et les dossiers les plus intéressants.