Record : de l’ADN de mammouths vieux de plus d’un million d’années

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Illustration de plusieurs mammouths des steppes. Crédits: Beth/Zaiken/Centre for Palaeogenetics

De l’ADN vieux d’1,2 million d’années a été récupéré et partiellement séquencé à partir des molaires de deux mammouths. C’est un record. Non seulement cet exploit repousse les limites de ce dont les méthodes scientifiques sont capables, mais l’étude nous révèle également une toute nouvelle lignée dans la famille des mammouths. Ces travaux ont été publiés dans la revue Nature.

Pour comprendre l’évolution des espèces, l’ADN, qui porte le code génétique de tous les êtres vivants sur la planète, est notre meilleure alliée. Malheureusement, ces molécules ne se conservent pas éternellement.

Nous savons, d’après une étude publiée en 2012 par une équipe américano-australienne, qu’une molécule d’ADN se désagrège à moitié en 521 ans. La moitié de ce qui reste disparait à son tour en 521 ans, et ainsi de suite. Au final, environ 1,5 million d’années plus tard, il n’en reste quasiment aucune trace.

Dans les faits, évidemment, les conditions de préservation ou de fossilisation viennent également raccourcir ce délai déjà très court. Aussi, jusqu’à présent, le plus vieil ADN connu nous provenait d’un cheval de Przewalski mort il y a environ 700 000 ans. Mais ça, c’était avant.

Trois molaires – révélées par la fonte du pergélisol sibérien dans les années 70 – ont en effet récemment livré de l’ADN mitochondrial de trois spécimens, dont deux sont morts il y a un peu plus d’1,2 million d’années.

Le génome de ces anciens mammifères s’était naturellement très dégradé au fil des millénaires. Aussi, les chercheurs du Centre de paléogénitique de Stockholm, à l’origine de cette étude, ont dû reconstituer minutieusement des milliards de minuscules fragments d’ADN.

Krestovka, Krestovka et Tchoukochya

Deux des pachydermes sont âgés de plus d’un million d’années. Le plus ancien, nommé Krestovka, évoluait il y a 1,2 million d’années. D’après les analyses, il appartenait à une lignée génétique de mammouths jusque-là inconnue – désormais nommée « mammouths de Krestovka » – ayant divergé des autres mammouths sibériens il y a plus de deux millions d’années.

Le second spécimen, appelé Adycha, est âgé de 1,2 à un million d’années. D’après son ADN, il s’agissait d’un mammouth des steppes ((Mammuthus trogontherii). Enfin le troisième, baptisé Tchoukochya, est l’un des premiers représentants des mammouths laineux (Mammuthus primigenius). Il serait mort il y a environ 700 000 ans.

Notez que l’âge des trois spécimens a pu être déterminé grâce aux données géologiques des sites à partir desquels ces molaires ont été extraites, couplées à des analyses moléculaires. Ces estimations sont donc les plus prudentes.

Cependant, les données du génome mitochondrial indiquent que le spécimen le plus âgé pourrait en fait avoir jusqu’à 1,65 million d’années, tandis que le second mammouth pourrait avoir 1,34 million d’années. Ceci étant dit, quelle que soit l’estimation prise en compte, cela reste beaucoup plus ancien que le record précédemment établi.

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Crédits : Wikimedia Commons

Enfin, ces travaux ont permis de confirmer que le mammouth laineux est bel est bien un descendant direct du mammouth des steppes. Les analyses ont également souligné que des variants génétiques associés à la vie dans l’Arctique (thermorégulation, amas graisseux, adaptations des rythmes circadiens, entre autres) étaient déjà présents chez Adycha – le mammouth des steppes – bien avant l’arrivée du mammouth laineux.