Les trilobites ne ressemblent peut-être pas à des créatures câlines, mais nous savons désormais qu’au moins une espèce de ces arthropodes utilisait de courts appendices comme fermoirs pour maintenir la femelle au moment de l’accouplement. Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Geology.
La vie amoureuse des trilobites
La reproduction sexuée représente un aspect fondamental de la biologie animale. Cependant, la diversité des stratégies de reproduction chez les métazoaires du Paléozoïque ancien reste encore débattue. En effet, les preuves directes des stratégies de reproduction proviennent de masses d’œufs exceptionnellement préservées chez les euarthropodes du Cambrien et de l’Ordovicien tels que les waptiidés et les trilobites, mais les adaptations anatomiques ou comportementales pour l’accouplement chez ces taxons sont largement inconnues.
Dans le cadre d’une étude, des chercheurs se sont intéressés à une espèce de trilobites. Il s’agit d’anciennes créatures qui ressemblaient à des punaises géantes et casquées. Ces invertébrés blindés, dont les espèces se comptaient autrefois par milliers, ont prospéré dans les océans pendant 270 millions d’années, avant de finalement s’étendre il y a environ 252 millions d’années durant l’extinction de la fin du Permien. Pour cette étude, les chercheurs ont analysé plusieurs fossiles de l’espèce Olenoides serratus découverts au début des années 1900. Ces animaux évoluaient il y a environ 508 millions d’années.
Les fossiles de trilobites préservent rarement les pattes. Seules 38 des 20 000 espèces connues proposent en effet des fossiles avec des appendices préservés. Ici, les chercheurs ont remarqué la présence d’une paire d’appendices plus courte au niveau de la section médiane de l’un des spécimens analysés.
Cette paire de jambes inhabituelle était donc plus étroite et plus courte que les paires de jambes situées à l’avant et à l’arrière. De plus, ces courts appendices n’avaient pas d’épines, des caractéristiques présentes sur les autres pattes de cette espèce de trilobite. La question était donc de savoir pourquoi un trilobite avait une paire d’appendices courts, minces et sans épines placés au niveau de sa section médiane.
Des fermoirs pour se placer
Pour enquêter, les chercheurs ont comparé les appendices d’O. serratus avec ceux d’arthropodes vivants. D’après les analyses, ces structures étaient probablement des fermoirs.
Lors d’une séance d’accouplement, il est probable que le mâle se plaçait au-dessus de la femelle, la tête alignée avec le tronc de cette dernière (au-dessus et décalé vers l’arrière). Les appendices du mâle s’alignaient alors avec deux paires d’épines qui dépassaient de la queue de la femelle. D’après les auteurs, les fermoirs du mâle pouvaient donc s’agripper à ces épines. Le rôle de ces fermoirs était alors de garantir que le mâle soit dans la bonne position lorsque les œufs de la femelle étaient libérés. De cette manière, cela augmentait les chances que son sperme féconde les ovules.
Un autre spécimen analysé dans le cadre de cette étude n’avait de son côté aucun fermoir. Les chercheurs pensent qu’il s’agissait d’une femelle. Cette espèce en particulier avait donc un véritable dimorphisme sexuel. Autrement dit, les mâles et les femelles avaient des caractéristiques différentes.
Cette stratégie d’accouplement des agrafes se voit aujourd’hui chez les limules ou crabes fer à cheval qui sont très éloignés des trilobites. Chez ces animaux, les mâles se disputent souvent les places pour accéder au dos des femelles, se blessant et s’arrachant parfois les appendices au cours de ces affrontements. Il est possible que O. serratus ait été tout aussi compétitif en matière d’accouplement.