L’accouchement humain est souvent décrit comme difficile, voire risqué. Contrairement à de nombreuses espèces animales qui donnent naissance sans complication, l’accouchement chez les humains requiert en effet souvent des interventions médicales et peut s’avérer incroyablement douloureux. Face à ces difficultés, on pourrait se demander pourquoi l’évolution n’a pas simplifié ce processus pour notre espèce au cours de ces dernières dizaines de milliers d’années. Une étude récente révèle pourtant que notre anatomie et nos modes d’accouchement sont le résultat d’un équilibre délicat entre protection de la mère et naissance du bébé. L’évolution aurait donc donné le meilleur d’elle-même en trouvant ce compromis, aussi imparfait soit-il.
Les particularités de l’accouchement humain
Les particularités de l’accouchement humain sont complexes et uniques parmi les espèces de mammifères. Cela tient principalement à deux caractéristiques anatomiques propres aux humains : la taille de la tête du bébé et l’étroitesse du canal pelvien de la mère.
Le cerveau humain est en effet relativement grand comparé à celui des autres espèces, ce qui se traduit par une tête volumineuse chez le nourrisson. Lors de l’accouchement, cette taille constitue alors un obstacle puisque la tête du bébé doit passer à travers le canal pelvien, dont les dimensions sont limitées.
On pourrait alors se demander pourquoi ce canal n’a pas évolué vers une forme plus large pour faciliter la naissance. Dans le cadre d’une étude, des chercheurs de l’Université du Texas et de l’Université de Vienne ont tenté de répondre à cette interrogation. Ils ont mis en évidence deux principaux compromis.
Des contraintes anatomiques
Le plancher pelvien joue un rôle clé dans l’accouchement humain. Ce groupe complexe de muscles, de ligaments et de tissus conjonctifs est situé sous le bassin, formant une sorte de hamac qui soutient les organes internes, notamment l’utérus, la vessie et le rectum. La principale fonction de ce plancher est de stabiliser la colonne vertébrale et de maintenir ces organes en position, particulièrement lors des mouvements quotidiens, mais son rôle devient essentiel pendant l’accouchement.
Le plancher pelvien doit en effet être à la fois ferme et souple pour soutenir les organes en position debout tout en permettant le passage du bébé lors de la naissance. En effet, pendant l’accouchement, le plancher pelvien doit se détendre et s’étirer pour laisser le bébé descendre à travers le canal de naissance. Cela implique une coordination entre les contractions de l’utérus et la capacité des muscles pelviens à se relâcher sous une pression intense.
Cependant, cette adaptabilité a ses limites. Si le plancher pelvien était trop épais ou trop rigide, il deviendrait difficile, voire impossible, pour le bébé de passer. À l’inverse, un plancher pelvien plus large et plus souple pourrait mieux faciliter l’accouchement, mais il risquerait de ne plus offrir un soutien adéquat aux organes internes. Ce déséquilibre pourrait engendrer des complications, comme le prolapsus des organes où les organes internes descendent ou s’affaissent, faute de soutien.
Des compromis évolutifs
Les simulations informatiques ont confirmé ces contraintes. Dans le cadre de ces travaux, les chercheurs ont analysé les forces exercées pendant l’accouchement et mesuré l’impact de différentes formes et épaisseurs sur le processus de naissance. Leurs résultats ont montré que même une petite augmentation de la taille du plancher pelvien permettrait certes un passage plus facile pour le bébé, mais cela affaiblirait considérablement le soutien des organes internes.
Inversement, un plancher pelvien plus épais nécessiterait une pression abdominale tellement élevée qu’il deviendrait pratiquement impossible pour la mère de pousser le bébé hors du canal. En somme, ces simulations ont confirmé que la structure actuelle du plancher pelvien représente le meilleur compromis pour maintenir à la fois le soutien des organes et un passage possible pour le bébé. En d’autres termes, notre corps a évolué en jonglant entre deux impératifs : permettre la naissance (et donc la survie de l’espèce) tout en protégeant la santé de la mère.