La compétition intense entre partenaires favorise l’évolution de stratégies d’accouplement extraordinaires, telle que la capacité des mâles à identifier les femelles prématurées qui sont sur le point de devenir matures et à s’associer avec elles jusqu’à ce qu’elles soient sexuellement réceptives. C’est notamment le cas des tétranyques. Une fois les femelles matures, ces acariens n’hésitent pas à s’attaquer directement à leur exosquelette en pleine mue pour les « déshabiller » entièrement dans le but de s’accoupler.
S’accoupler à n’importe quel prix
Dans le règne animal, les espèces ont développé différentes adaptations et comportements pour maximiser leurs chances de reproduction et assurer la survie de leur progéniture. Parmi elles, certaines peuvent nous paraître étranges et/ou fascinantes.
Chez certaines espèces d’araignées, par exemple, le mâle offre un cadeau comestible à la femelle pendant l’accouplement. Ce cadeau, généralement une proie, sert à apaiser la femelle et à augmenter les chances de succès de l’accouplement. Toutefois, dans certains cas, le mâle peut même sacrifier sa propre vie en devenant lui-même une proie pour la femelle.
Certaines espèces, comme les limaces de mer, sont également hermaphrodites, ce qui signifie qu’ils possèdent à la fois des organes reproducteurs mâles et femelles. L’accouplement se fait alors par l’échange de sperme entre les deux individus, permettant à chacun de fertiliser les œufs de l’autre. Dans certaines espèces d’insectes enfin, comme les punaises d’eau, les mâles utilisent des organes génitaux pointus pour perforer la femelle et transférer leur sperme.
Le cas des tétranyques
Les tétranyques forment une famille d’acariens, qui sont de petits arachnides. Ces animaux largement répandus à travers le monde se retrouvent souvent sur les plantes où ils se nourrissent de la sève et des tissus végétaux. Les tétranyques sont également particulièrement connus pour leur capacité à tisser des toiles très fines sur les feuilles et les tiges des plantes. Ces toiles, souvent difficiles à voir à l’œil nu, peuvent donner aux feuilles une apparence pâle ou argentée.
Dans le cadre d’une étude, des chercheurs de l’Université de Vienne se sont récemment intéressés à la stratégie d’accouplement de ces acariens en laboratoire. Comme dit en préambule, les mâles de certaines espèces ont développé la capacité d’identifier les femelles sur le point de devenir matures. « Ici, une femelle qui devient mature se reconnaît à son exuvie [vieille peau externe] qui devient argentée lorsque l’air se loge entre elle et la nouvelle peau« , précise Peter Schausberger, principal auteur de ces travaux, dont les résultats sont publiés dans la revue iScience. Ce processus de mue s’opère lorsque les femelles sont âgées d’une dizaine de jours environ.
L’objectif est alors de s’associer avec ces femelles jusqu’à ce qu’elles soient sexuellement réceptives dans le but d’entamer le processus d’accouplement. Et ce processus, les chercheurs ont découvert qu’il est particulièrement violent.

Déshabille-toi !
C’est là que les choses deviennent vraiment bizarres. Pour préparer les femelles à l’accouplement, les mâles se glissent sous ces dernières et utilisent leurs pédipalpes (des pièces buccales en forme d’aiguille) pour leur arracher la peau. Une fois l’exuvie retirée, les mâles peuvent insérer leur édéage (leur organe reproducteur) dans les femelles. C’est la première fois que ce comportement de « décapage de la peau » est enregistré chez une espèce.
Les chercheurs ont également remarqué que les mâles utilisaient parfois leurs pattes antérieures pour les inciter à entamer le processus de mue plus rapidement, probablement pour s’assurer que d’autres mâles ne prennent pas le contrôle de leur femelle.