À quoi doit-on les remous des nuages d’orage ?

Crédits : CC0 Domaine public.

En saison chaude, il est fréquent de voir des cumulus initialement inoffensifs se développer et gonfler jusqu’à atteindre des proportions démesurées. Les nuages arborent alors une forme en chou-fleur caractéristique du temps orageux. On parle de bourgeonnement, voire de bouillonnement, pour désigner le phénomène.

On peut se demander à quoi tient cette particularité morphologique que l’on retrouve chez les gros cumulus et cumulonimbus, mais également dans le cas de panaches volcaniques ou nucléaires. Il se trouve que ces formations exacerbent un processus qui est présent chez presque tous les types de nuages. Il s’agit de la turbulence à l’interface entre le milieu nuageux et le milieu environnant.

À l’intérieur d’un cumulus, l’air est saturé et empli d’une myriade de gouttelettes en suspension. Les conditions sont comparables à celles rencontrées lors d’un brouillard très dense. À l’extérieur, l’air est sous-saturé, sans gouttelettes et avec une très bonne visibilité. Or, à l’interface entre ces deux milieux, on trouve un important mélange entre l’air environnant sous-saturé et l’air nuageux saturé.

Des tourbillons alimentés par une instabilité d’interface

Ce mélange prend la forme de tourbillons qui redessinent constamment l’aspect du nuage. Ils présentent différentes intensités suivant le type et le stade de développement de ce dernier. Certains, comme le placide stratus ou, de façon plus inattendue, la base de certains cumulonimbus (voir l’illustration ci-dessous), peuvent avoir une forme laminaire lorsque la couche d’air en question est stable et le mélange turbulent à l’interface faible.

nuages orage
Orage supercellulaire à faible précipitations avec un régime laminaire (bas, forme en soucoupe) et un régime turbulent (haut, bourgeonnements). Crédits : capture vidéo / Freddy McKinney.

Ce qui se passe au niveau d’une ascendance orageuse relève du même principe, à la différence près qu’en raison de sa vigueur, le mélange et les circulations turbulentes y sont très fortement accentués. Le cœur de l’ascendance peut dépasser les 150 kilomètres par heure, alors que l’environnement immédiat est statique ou subit un mouvement descendant. En conséquence, le gradient de vitesse à l’interface entre les deux milieux est très violent avec des instabilités qui alimentent une large gamme de tourbillons, allant de plusieurs centaines de mètres à moins d’un centimètre.

Continuellement, les plus gros d’entre eux se fragmentent en plus petits jusqu’à l’échelle de dissipation visqueuse, ce qui correspond au principe de cascade turbulente. En somme, c’est la présence de cette population d’innombrables tourbillons générés par une puissante instabilité d’interface qui explique la morphologie particulière des nuages convectifs.

Source : Storm and Cloud Dynamics, William R. Cotton & coll. 2010.